dimanche 18 mai 2025

JURIShebdo Immobilier numéro spécial 68 du 7 novembre 2017

AccueilAnciens numérosJURIShebdo Immobilier numéro spécial 68 du 7 novembre 2017
Au sommaire :


– 2 – Jurisprudence –
Baux d’habitation : Hausse de loyer sous-évalué
Baux commerciaux : Impayés de loyer. Pas de référé pour un loyer contesté / Déplafonnement des baux de plus de 9 ans. Pas de renonciation par avance à un renouvellement pour 9 ans / Sous-location : charges comprises ou non ? / Obligation de délivrance
QPC : Le texte de la question du demandeur doit être respecté par le juge
Droit de préemption : 2 SAFER préemptent sur 2 départements
Urbanisme : Règles de construction; hauteur de niveau pour des combles / IGH. Des duplex en niveau haut / Accélération des recours par un seul degré de juridiction / Reconstruction d’un bâtiment détruit
Fiscalité : Taxe foncière : pas d’exonération pour des immeubles affectés à un syndicat professionnel / Dégrèvement pour des travaux d’économie d’énergie dans les logements sociaux / Plus-values. Interposition de société luxembourgeoise. Abus de droit / SCI. Revenus fonciers. Charges déductibles pour un associé détenant l’usufruit des parts
– 5-7 – Analyse –
– Le meublé touristique dans le viseur de l’administration, par Alexandra
Plain et Céline Quintin (avocates, Gowling WLG France)
– Rénovation d’immeubles : spécificités des garanties et assurance par Claire
Jouffrey (avocate, Fidal)
– 10 – Projets –
L’avant-projet de loi logement
– 12 – Rencontre –
Le congrès de la FNAIM

jugé>En cas de désaccord sur le montant duloyer révisé, le bailleur doit saisir le juge desloyers commerciaux, mais non le juge desréférés pour obtenir la hausse de loyer (CAParis 7 déc. 2017, p.2).>Dans un bail commercial, les parties nepeuvent pas renoncer pour l’avenir à unrenouvellement de bail de 9 ans(CA Paris,6 déc. 2017, p.2).>La suppression temporaire d’un degré dejuridiction dans les zones tendues ne s’ap-plique pas au recours contre un refus depermis de construire ou contre une décisionde sursis à statuer (CE, 8 nov. 2017, p.6).>L’interposition d’une société luxembour-geoise dans l’achat d’un bien immobilier enFrance, effectuée dans un but exclusivementfiscal, a été qualifiée d’abus de droitpar leConseil d’État (25 oct. 2017, p.9).>L’usufruitier de parts de SCI peut déduiresa quote-part de déficit de ses autres reve-nus fonciers (CE, 8 nov. 2017, p.9).programmé>Jacques Mézard présente l’avant-projet deloi logement: trois titres, 16 chapitres et 53mesures (p.10).demandé>Le nouveau président de la FNAIM, Jean-Marc Torrollion, demande au ministre de lacohésion des territoires de renoncer à l’en-cadrement des loyers (p.12).analysé>Selon Alexandra Plain et Céline Quintin(Gowling WLG France), lemeublé touristiqueest dans le viseur de l’administration(p.5).>Claire Jouffrey (Fidal) analyse l’évolution de lajurisprudence en matière de garanties et d’assuran-ce pour le cas destravaux sur existants(p.7).Des ondes positives!C’est à un spectacle fascinant que les congressistes de laFNAIM ont pu assister ce 12décembre en écoutant Olivier Torres.Professeur à Montpellier, ce normalien s’est spécialisé dans la san- au travail. Considérant que le lien entre le travail indépendantet la santé était très peu étudié, il s’est attelé à la recherche sur cethème, qui vise naturellement la plupart des professionnels de laFNAIM. Le statut d’indépendant comporte des facteurs néfastes à lasanté: le stress, l’incertitude du carnet de commandes, la surcharge detravail et la solitude. Mais ce statut induit par ailleurs, et cet aspect estencore moins analysé, des facteurs “salutogènes”, au nombre des-quels Olivier Torres mentionne le sentiment de maîtrise de son destin,l’endurance et l’optimisme. Sur ce dernier point, Olivier Torres décriten contrepoint, sous les rires de la salle, la figure de l’anxieux (qu’ilinvite à se soigner) et de l’anxiogène, face auquel il vaut mieux…prendre la tangente! Si vous voulez vous joindre à ce vent d’optimis-me, contactez l’observatoire Amarok que dirige Olivier Torres.Il était difficile de prendre la parole à la suite de cet exposé des plusbrillants, mais le nouveau président de la FNAIM, Jean-Marc Torrollion,tout à l’enthousiasme de ses nouvelles fonctions, a relevé le défi! Il estaidé par la conjoncture puisque le marché devrait atteindre en 2017 lerecord de 986000 transactions de logements anciens. Le président dela FNAIM appelle les pouvoirs publics à la concertation, notammentpour la réforme du droit de la copropriété. Pour l’évolution des rap-ports locatifs, il dit la disponibilité des professionnels pour collaborerau développement des observatoires de loyers. Il considère que le bailmobilité en cours de conception doit trouver sa place, mais il appelleà d’autres réformes par exemple sur les décrets relatifs aux charges etaux réparations locatives. Déniant quémander tout avantage fiscal, ilinvite au contraire les pouvoirs publics à considérer avec attention laproposition de la FNAIM de mettre au point un statut du bailleur pri- pour développer une offre de logements intermédiaires, et àrenoncer à l’encadrement des loyers.Le ministre de la cohésion des territoires était fort attendu sur ce pointet Jacques Mézart a partiellement levé les incertitudes en annonçantfaire appel des deux jugements ayant annulé les arrêtés fixant lesloyers de référence, à Lille et à Paris. Renouvelant l’exercice convenude la défense de la complémentarité du parc privé et du parc public, ila esquissé une piste pour sortir de l’imbroglio actuel du régime desloyers. Il envisage, dans le cadre du projet de loi sur le logement, dedécorréler l’observation des loyers et l’encadrement mais il ne souhai-te ni accélérer ni renoncer à l’encadrement. Le ministre expose docte-ment qu’il faut écouter puis trancher. S’il est dans la première phase, iln’est sur ce point manifestement pas dans la seconde. Mais restons surles ondes positives que diffusait Olivier Torres. Le ministre de la cohé-sion des territoires espérait ne pas être anxiogène et invitait OlivierTorres à passer le message à Bercy. Nous relayons également le ventd’optimisme montpelliérain! BDJURIShebdoLa lettre du droit immobilierpour les professionnelswww.jurishebdo.frNUMÉRO Spécial 6818 DÉCEMBRE 2017ISSN1622-141918EANNEEL’ESSENTIEL..immobilier- 2 -Jurisprudence-Baux d’habitation: Hausse de loyer sous-évaluéBaux commerciaux: Impayés de loyer. Pas de référé pour un loyercontesté / Déplafonnement des baux de plus de 9 ans. Pas de renon-ciation par avance à un renouvellement pour 9 ans / Sous-location:charges comprises ou non ? / Obligation de délivranceQPC: Le texte de la question du demandeur doit être respecté par le jugeDroit de préemption: 2 SAFER préemptent sur 2 départementsUrbanisme: Règles de construction; hauteur de niveau pour descombles / IGH. Des duplex en niveau haut / Accélération des recourspar un seul degré de juridiction / Reconstruction d’un bâtiment détruitFiscalité: Taxe foncière : pas d’exonération pour des immeubles affec-tés à un syndicat professionnel / Dégrèvement pour des travaux d’écono-mie d’énergie dans les logements sociaux / Plus-values. Interposition desociété luxembourgeoise. Abus de droit / SCI. Revenus fonciers. Chargesdéductibles pour un associé détenant l’usufruit des parts- 5-7 -Analyse-- Le meublé touristique dans le viseur de l’administration, par AlexandraPlain et Céline Quintin (avocates, Gowling WLG France)- Rénovation d’immeubles: spécificités des garanties et assurance par Clai-re Jouffrey (avocate, Fidal)- 10 -Projets-L’avant-projet de loi logement- 12 -Rencontre-Le congrès de la FNAIMSOMMAIREEDITORIALNuméro spécial:jurisprudence
18décembre 20172JURIShebdoimmobilierllBAUXDHABITATION- BAUXCOMMERCIAUXBaux d'habitation Hausse de loyer sous-évalué(CA Paris, Pole 4, ch. 3, 7décembre2017,n°15-09078)Un bailleur avait adressé une propositionde renouvellement de bail à son locataire le15mai2012, le contrat expirant le31décembre2012. Il invoquait une sous-évaluation manifeste du loyer, le locataireétant dans les lieux, situés à Aubervilliers(93) depuis 1980.La cour d'appel admet l'application de l'ar-ticle 17-c de la loi du 6juillet 1989:« Attendu en l'espèce que le loyer mensuelen mai2012 est de 196,04 soit un prix de4,90 /m2; Qu'au soutien de sa demande d'augmenta-tion du loyer le bailleur produit la copie desix baux d'habitation concernant les loyersde logement de 2 pièces, situés dans lamême zone géographique que le logementconcerné, ayant comme lui une surfacehabitable de 40m2;Que ces loyers mensuels s'établissent entre322,50 et 364,74 soit une valeur locati-ve mensuelle de 344,40;Que ces références répondent aux condi-tions prévues par l'article 19 de la loi du6juillet 1989 précitée, s'agissant de loge-ments comparables quant à la surface habi-table et au nombre de pièces et qui concer-nent en particulier quatre locations pourlesquelles […] il n'y a pas eu de changementde locataire depuis 3 ans;Attendu qu'au vu de ce qui précède le loyerréglé par les intimésest manifestementsous-évaluéau sens de l'article 17 c de la loidu 6juillet 1989 ».La cour fait ensuite l'application du décretdu 26août 2011 limitant la hausse de loyerapplicable à la moitié de la différence entrele loyer ainsi fixé et le loyer à la date derenouvellement.Elle retient donc une hausse de 74,18 /m2,fixant le loyer à 270,22 par mois. La haus-se est étalée sur 6 ans par sixièmes successifssoit 12,36 par mois pendant 6 ans».Observations:Dans ce litige rendu sousl'empire de l'article 17 c avant la loi Alur, lebailleur a ainsi pu faire la preuve de la sous-évaluation manifeste du loyer. Cette preuvelui incombe (Civ. 3e, 12octobre2011).L'écart entre le loyer pratiqué et le loyerdu voisinage était donc de 75,7%. Confor-mément au décret annuel de blocage desloyers applicable en région parisienne (envigueur en 2012), seule la moitié de l'écartdevait être retenue (soit 37,8%), écart lui-même applicable par sixièmes annuelspuisque la hausse de loyer dépassait 10%.Baux commerciauxImpayés de loyer. Pas de référépour un loyer contesté(CA Paris, Pôle 1, ch. 2, 7décembre2017,n°16/20921)Un bailleur de locaux commerciaux avaitconsenti un renouvellement de bail en 2009pour un loyer de 31500euros par an. Le1eravril 2015, il avait informé son locataire,par LR AR, « à l'occasion de la révision trien-nale que le loyer serait augmenté et fixé à52000euros ».En juin2015, le bailleur avait adressé uncommandement visant la clause résolutoirepour obtenir notamment l'écart de loyerentre l'ancien loyer et le loyer révisé.La cour d'appel dit n'y avoir lieu à référé:« Ainsi que le premier juge l'a exactementretenu […], il existe des contestationssérieuses aux demandes découlant duconstat de l'acquisition de la clause résolu-toire du bail fondé sur le commandementde payer des 15 et 26juin2015 délivré […]pour avoir paiement, pour la période d'avrilà juin2015, des écarts entre le loyer contrac-tuel et le loyer révisé outre un "écart primed'assurance 2014", le dépôt de garantie, laprime d'assurance 2015 ainsi que diversespénalités de retard.En effet, d'une part, le gérant de la sociétéERJ a comparu en personne devant le jugedes référés pour indiquer avoir refusé cetteaugmentation de près de 80%, être à jourde ses loyers et ne pas s'opposer à sondépart moyennant une indemnité d'évic-tion et Madame L., qui a décliné la proposi-tion de renvoi de ce juge pour lui permettrede consulter un avocat spécialisé dans lecontentieux des baux commerciaux, ne dis-cute pas utilement le caractère sérieuse-ment contesté de cette proposition de loyerrévisé effectuée au vu d'un rapport d'ex-pertise immobilière qui n'a pas été dressécontradictoirement.D'autre part, elle ne conteste pas que lejuge des loyers commerciaux n'a pas étésaisi. […]Les demandes fondées sur ce commande-ment de payer ne relèvent donc pas dujuge des référés».La cour rejette donc la demande du bailleur.Observations:L'article 809 alinéa2 ducode de procédure civile permet au prési-dent du tribunal de grande instance d'ac-corder une provision au créancier lorsquel'existence de l'obligation n'est pas sérieu-sement contestable. En l'espèce, la créancede loyer du bailleur faisait l'objet d'unecontestation car celui-ci réclamait le paie-ment d'une hausse de loyer résultantd'une révision mais la procédure qu'il avaitsuivie pour fixer le loyer révisé était trèsprobablement insuffisante.La révision du loyer peut être demandéepar le bailleur ou le locataire (art. L 145-37du code de commerce). En l'espèce, c'est lebailleur qui avait pris l'initiative, pour aug-menter fortement le loyer. La demandepeut être formée par acte d'huissier ou parlettre recommandée avec AR (art. R 145-20). Mais encore faut-il que la demandesoit suivie d'un accord. La Cour de cassa-tion a déjà jugé que commet un abus dedroit le bailleur qui fait procéder à une sai-sie sur le compte bancaire du locatairepour avoir paiement d'un arriéré de loyer,calculé sur la base d'une révision triennalequ'il avait unilatéralement proposée àcelui-ci, alors qu'en l'absence d’accord desparties, il lui incombait de saisir le juge desloyers commerciaux pour fixer le prix duloyer révisé (Civ. 3e, 12avril 1995). L'arrêtrapporté est dans la même ligne. Lebailleur ne peut se fonder sur sa seuledemande de loyer révisé pour en obtenirpaiement, sans accord du locataire. En casde désaccord, il doit saisir le juge des loyerscommerciaux. Faute de l'avoir fait, le mon-tant du loyer à payer par le locataire étaitincertain et ne pouvait justifier la condam-nation en référé au paiement du loyerrévisé.A retenir:En cas de désaccord sur le mon-tant du loyer révisé, le bailleur doit saisir lejuge des loyers commerciaux mais non lejuge des référés pour obtenir le paiementde la hausse de loyer.Déplafonnement des baux deplus de 9 ans. Pas de renonciationpar avance à un renouvellementpour 9 ans(CA Paris, Pôle 5, ch. 3, 6 déc. 2017,n°15/19801)Un acte sous seing privé du 29juillet 2003prévoyait, en renouvellement, un bail du1erjanvier 2003 au 31décembre2012 pourune boutique de bar restaurant brasserie àParis, rue Montmartre. Le locataire avaitdemandé le renouvellement par acte du20juillet 2012 à un loyer de 37800 mais lebailleur demandait un loyer déplafonné à100000.La cour d'appel admet le déplafonnementJURISPRUDENCE
en raison de la durée du bail à renouveler:« En application de l'article L 145-34 ducode de commerce, la règle du plafonne-ment du loyer du bail renouvelé est écartéesi le bail expiré avait une durée contractuel-le supérieure à 9 ans.En l'espèce, le bail expiré n'indique pasexpressément la durée pour laquelle il a étéconclu, mais précise qu'il est renouvelé du1erjanvier 2003 au 31décembre2012, « puisainsi de suite pour des périodes similaires ».[…]Il n'est pas contesté que les baux commer-ciaux se renouvellent pour une période de 9ans conformément aux dispositions d'ordrepublic de l'article L 145-12 du code de com-merce. Lors de chaque renouvellement ilappartient aux parties d'exprimer expressé-ment leur volonté de contracter pour unedurée plus longue, faute de quoi le bailrenouvelé pour la durée légale de 9 années.Dès lors, les parties ne pouvaient renoncerpour l'avenir à la durée de neuf annéespour les baux se renouvelant. En revanche,elles ont pu le faire valablement pour lerenouvellement intervenu le 29juillet 2003à effet rétroactif du 1erjanvier 2003.[…] Dans l'acte signé le 29juillet 2003, lesdates de début et de fin de bail sont écritesen chiffres et en lettres ainsi qu'en carac-tères gras, attirant ainsi l'attention dessignataires. […] La commune intention des parties abien été de conclure un renouvellement debail pour une durée de 10 ans.[…] Dans ces conditions, le loyer du bailrenouvelé doit être fixé à la valeur locative ».La cour retient une valeur locative par rap-port aux prix du voisinage et aux valeurslocatives résultant des décisions judiciaires.Elle fixe le loyer à 55600euros.Observations:Les baux de plus de 9 anséchappent au plafonnement en applica-tion de l'article L 145-34 du code de com-merce (Civ. 3e, 13novembre 1997). Les par-ties ayant conclu un accord de renouvelle-ment en 2003 pour dix ans, le bail devaitéchapper au plafonnement et c'est cequ'admet la cour d'appel.Mais elle analyse également la facultépour les parties de conclure en renouvelle-ment un bail d'une durée excédant 9 ans.Elle juge que les baux se renouvellent pour9 ans, en application de l'article L 145-12,et que cette règle est d'ordre public. Cettedécision est dans la ligne d'un arrêt de2013: un locataire n'avait pas répondu àune offre de renouvellement pour 12 ansd'un bail initialement conclu pour 12 anset il demandait la constatation du renou-vellement pour 9 ans. La cour d'appeln'avait relevé aucun accord des parties surla durée de 12 ans postérieurement à ladate d'effet du congé. La Cour de cassa-tion avait jugé que la cour d'appel en avaitdéduit à bon droit que le bail s'étaitrenouvelé pour 9 ans (Civ. 3e, 18juin2013).Dans l'arrêt rapporté, la cour d'appel deParis admet que les parties ne pouvaientpas renoncer pour l'avenir à la durée de 9ans, mais qu'elles pouvaient valablementle faire rétroactivement, en signant unaccord en juillet2003 pour une prise d'ef-fet en janvier2003.A retenir:- Les parties ne peuvent pasrenoncer pour l'avenir à un renouvelle-ment de bail de 9 ans;- mais elles peuvent convenir rétroactive-ment d'un renouvellement de bail pourune durée de plus de 9 ans.Sous-location. Charges com-prises ou non?(CA Paris, Pôle 5, ch. 3, 6décembre2017,n°16/04271)Un sous-locataire titulaire d'un contrat de 9ans avait lui-même sous-loué pour un an. Lesous-sous-locataire, M.B., étant resté dansles lieux à l'échéance, il avait obtenu judi-ciairement la requalification de son contrat,bail dérogatoire de courte durée, en sous-bail de 9 ans régi par le statut.Le litige restait pendant sur l'indexation duloyer. M.B. demandait que le loyer, définicharges comprises, soit ventilé par le jugeen une fraction correspondant au loyer, àindexer, et une fraction correspondant àdes provisions de charges.La cour d'appel statue d'abord sur la pres-cription puis rejette la demande:« L'action en contestation relative à l'appli-cation de l'indexation au montant du loyerdu sous-bail est soumise à la prescription decinq années prévues par l'article 2224 ducode civil, et non pas à celle de l'article L145-60 du code de commerce, qui ne s'ap-plique qu'aux actions nées spécifiquementdu statut des baux commerciaux ».Le dernier rappel d'indexation remontant à2010, l'action en contestation résultant d'uneassignation de 2013 est jugée non prescrite.Sur le fond, la cour d'appel juge que les par-ties pouvaient librement, en application del'article 1134 du code civil fixer les modalitésde fixation du prix, dans le cadre d'un sous-bail commercial.« En l'espèce les parties ont prévu que leloyer devait être fixé toutes charges com-priseset sa variation déterminée par l'exis-tence d'une clause d'échelle mobile.Ainsi, le loyer librement convenu toutescharges comprises, et indexé sur la variationde l'indice INSEE du coût de la constructionpar le jeu d'une clause d'échelle mobile, faitla loi entre les parties et M. B. n'est pasautorisé à modifier unilatéralement, enscindant la part de charges de celle quiconstituerait le louer "nu", ni à demanderau juge de procéder ainsi, ce qui amèneraitle juge à se substituer à la volonté des par-ties […]Les demandes de M. B. en fixation du loyeret des charges, et en remboursement de18décembre 20173JURIShebdoimmobilierllBAUXCOMMERCIAUXJURISPRUDENCEQPC: le texte de la questionposée par le demandeur doit êtrerespectée par le jugeUne QPC portait sur le remboursement desommes indûment versées par un preneurlors de la cession d'une exploitation.La Cour de cassation juge à ce propos quela question ne doit pas être modifiée parle juge:« Attendu qu'il n'appartient pas au jugede modifier la teneur de la question prio-ritaire de constitutionnalité que pose unepartie, de sorte que c'est au regard de laformulation arrêtée par celle-ci qu'ilconvient de se prononcer ».Sur le fond, la Cour de cassation rejette lademande de transmission de la QPC rela-tive à l'article L 411-74 du code rural:« Attendu que la question ne présentepas un caractère sérieux, dès lors que lamajoration instituée, qui a pour finalité lacompensation du préjudice subi par lepreneur à bail du fait de la privation dessommes indûment versées, ne constituepas une sanction à caractère de punitionet ne ressortit pas, en conséquence, auchamp d'application de l'article 8 de laDéclaration des droits de l'homme et ducitoyen du 26août 1789 ».L'article L 411-74 du code rural interdit aubailleur et au preneur sortant de perce-voir des sommes non justifiées à l'occasiond'un changement d'exploitant. La loi pré-voit des sanctions pénales et une obliga-tion de restituer les sommes indûmentpayées. L'article litigieux prévoit aussi unemajoration des sommes à reverser, calcu-lée sur le taux de l'intérêt légal majoré detrois points. Selon la Cour de cassation,cette disposition ne justifie pas de critiqueconstitutionnelle. L'article 8 de la Déclara-tion des droits de l'homme fixe le principede la légalité des délits et des peines etcelui de la nécessité des peines.(Civ. 3e, 7décembre 2017, n°1359, FS-P+B,non-lieu à renvoi, pourvoi n°17-40055).
sommes au titre d'un trop versé de loyers etde charges seront rejetées ».Observations:Deux points.1. Sur la prescription. Le délai de prescrip-tion de deux ans de l'article L 145-60 ducode de commerce a un domaine limitéaux actions exercées en vertu du chapitredu code de commerce concernant les bauxcommerciaux. Mais les actions relevant dudroit commun ne sont pas régies par cetexte dérogatoire. Relèvent ainsi du droitcommun une action en paiement desloyers (Civ. 3e, 5octobre 1994), ou uneaction en répétition de charges indues (CAParis, 5octobre 1995).Le présent arrêt confirme l'application dudélai de droit commun pour une actioncontestant la répartition de la somme dueentre le montant du loyer et celui descharges.2. Sur le fond. La cour d'appel admet lafaculté pour les parties de convenir d'unsous-bail comportant un loyer, chargescomprises, par application du principe deliberté contractuelle (art. 1134 du codecivil).Rappelons que la loi Pinel de 2014 a inséréun article L 145-40-2 dans le code de com-merce selon lequel "Tout contrat de loca-tion comporte un inventaire précis et limi-tatif des catégories de charges, impôts,taxes et redevances liés à ce bail, compor-tant l'indication de leur répartition entre lebailleur et le locataire". Mais la décision nefait pas état de la loi nouvelle, les faitsétant antérieurs à la loi.Obligation de délivrance et d’en-tretien(CA Paris, Pôle 5, ch. 3. 6décembre2017,n°16/05100)Un bail commercial de 1966 concernant unlocal de restaurant avec cuisine, cave etlogement au 1erétage, imposait au locatai-re « de prendre les lieux dans l’état ils setrouveront lors de l’entrée en jouissancesans pouvoir exiger aucun changement niréparation ».Or l’expert avait relevé dans son rapportl’état de vétusté et de dégradations deslocaux (cave inutilisable car très humide,arrière-salle vétuste et détériorée) maisajoutant que les détériorations n’étaientpas de nature à entraver durablement et defaçon permanente l’exploitation du restau-rant. La cour d’appel rappelle cependant lesobligations du bailleur:« Les dispositions contractuelles mettant àla charge du locataire tous les travaux deréparations ne dispensent pas le bailleur derespecter son obligation de délivrer à sonlocataire et d’entretenir des locaux en étatde servir à l’usage pour lequel ils sont des-tinés, et d’en assurer la jouissance paisible.Or les travaux liés à la vétusté incombent aubailleur, de même que la réparation desdésordres affectant les parties communes,tels que les infiltrations provenant des cana-lisations, des murs de soutènement desgouttières, et des cheminées ».La cour invitele bailleur à saisir le syndicpour mettre un terme aux désordres et jugeque le bailleur « ne justifie pas avoir fait lesdiligences pour procéder aux réparationsdesdits désordres ». Elle accorde une indem-nité au preneur pour préjudice de jouissan-ce de 9000.Observations:La cour fait ici applicationdes règles du droit commun. Une disposi-tion contractuelle n’écarte pas l’obligationde délivrance du bailleur. (Dans le mêmesens, voir Civ. 3e, 5juin 2002).Droit de préemptionQuand deux SAFER préemptentconjointement sur deux départe-ments(Civ. 3e, 7décembre2017, n°1255, F-P+B,rejet, pourvoi n°16-24190)Une propriété agricole était située pourpartie dans le Cantal et pour partie dansl'Aveyron. Les propriétaires avaient vendul'ensemble et avaient notifié la vente auxdeux SAFER concernées. Celles-ci avaientexercé leur droit de préemption « de façonsolidaire et conjointe », chacune « pour lapartie située dans son périmètre d'interven-tion ».L'acquéreur évincé contestait la validité dela préemption, mais la Cour de cassationrejette son recours:« Mais attendu qu'ayant relevé […], que laSAFER et la SAFALT avaient adressé à cha-cun des commissaires du Gouvernement lesconditions de vente telles que notifiées (sur-face totale et prix global) en précisant lasurface située dans chaque département,en procédant à une ventilation du prix et ens'engageant ensemble, mais chacune surson propre territoire d'action, pour remé-dier la difficulté résultant de ce qu'aucunedissociation du prix n'était faite dans l'actede vente initial, que les décisions de pré-emption avaient été exercées en conformi- avec les avis de leurs commissaires duGouvernement respectifs et exactementretenu, faisant usage de son pouvoir derequalification des actes litigieux, que lesobligations de la SAFER et de la SAFALTétaient indivisibles, en ce qu'elles portaientsur l'exercice du droit de préemption danssa globalité et pour un prix déterminé, etinterdépendantes dans la façon d'y parve-nir, et que les SAFER avaient pu choisir lasolution de cet achat indivisible plutôt quecelle de la délégation de compétence, lacour d'appel a légalement justifié sa déci-sion ».Le pourvoi est rejeté.Observations:L'auteur du pourvoi souli-gnait que la SAFER ayant une zone d'ac-tion définie par l'arrêté d'agrément, il fal-lait au moins qu'une délégation de pou-voir soit adressée par une SAFER à l'autreafin que cette dernière préempte la totali- du bien. Mais cet argument est repous-sé. La Cour de cassation valide donc ce pro-cédé de préemption conjointe permettantd'embrasser l'acquisition d'une propriétésur deux départements.UrbanismeRègles de construction. Hauteurdes niveaux pour des combles(CE, 6décembre2017, 1eet 6echambres,n°399524)Le PLU de Saint-Pierre (la Réunion) compor-tait, pour la parcelle concernée par un per-mis de construire des logements dépendantd'une école, une limitation des hauteurs deconstruction. D'une part, elles devaientcomporter au plus deux niveaux deconstruction au-dessus du rez-de-chausséeet un comble, d'autre part leur hauteur nedevait pas excéder 11 mètres lorsqu'elle estmesurée à l'égout des toits et 16 mètresmesurée au faîtage.Le permis contesté autorisait un immeuble« comportant deux niveaux d'habitationau-dessus du rez-de-chaussée et un espacecompris entre ce dernier niveau et les ver-sants du toit. Cet espace, d'une hauteur de1,70 mètre au droit des façades, par rapportau dernier niveau d'habitation, avec desouvertures ménagées en bas de cette partiedu bâtiment prolongeant les façades, sepoursuit selon une pente de 50 degrés jus-❘◗Le réseau d’avocats Kalliopéouvreun bureau secondaire en régionAuvergne-Rhône-Alpes. Il sera animépar Jocelyn Duval.18décembre 20174DROITDEPRÉEMPTION- URBANISMEJURIShebdoimmobilierllActeursJURISPRUDENCEsuite p. 6
18décembre 20175JURIShebdoimmobilierllSpéculation immobilière, pénurie de loge-ment, concurrence déloyale envers les hôte-liers, nuisances subies par les coproprié-taires, autant de problématiques aujour-d’hui soulevées par les locations meubléesde courtes durées touristiques via des plate-formes collaboratives de type Airbnb!Dans ce contexte, l’article 51 de la loi pourune République Numérique du7octobre2016 et son décret d’applicationn°2017-678 du 28avril2017 modifient lecode de tourisme en instituant une procé-dure d’enregistrement des loueurs. Paris est la première ville à avoir adoptécette procédure d’enregistrement. Depuisle 1erdécembre 2017, les loueurs parisiensdoivent faire figurer sur leur offre de loca-tion le numéro d’enregistrement obtenuauprès du télé-service de déclaration mis enplace. Plusieurs autres grandes villes, tellesque Bordeaux, Nice ou encore Toulouse,ont également opté pour cette procédure,qui devrait s’appliquer courant 2018.Champ d’application de la procé-dure d’enregistrementL’article 51(1)susvisé donne la faculté auconseil municipal de soumettre à déclara-tion préalable, toute offre de location meu-blée de courte durée destinée à une clien-tèle de passage qui n’y élit pas domicile.Seules les communes s’applique la pro-cédure de changement d’usage, à savoir lescommunes de plus de 200000 habitants,celles des départements des Hauts-de-Sei-ne, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne ainsi que, lorsqu’elles en ont fait lechoix, les communes de plus de 50000habitants situées dans des zones dites« tendues » disposent de cette prérogative.Le nouveau dispositif s’applique indistincte-ment que la location soit occasionnelle ounon, que le local constitue ou non la rési-dence principale du loueur, et quelle quesoit sa qualité, personne morale ou phy-sique.Fonctionnement de la procédured’enregistrementLa procédure est simple et rapide. Poureffectuer sa déclaration(2), il suffit d’utiliserle télé-service (ou tout autre moyen quiaura été prévu par la commune) et d’y ren-seigner un nombre limité d’informations. Sices informations sont modifiées ultérieure-ment, le loueur doit effectuer une nouvelledéclaration.Une fois la déclaration complétée, la com-mune délivre immédiatement et automati-quement un accusé de réception contenantle numéro d’enregistrement. Ce numérodoit impérativement être mentionné par leloueur dans son offre de location. Le défaut d’enregistrement(3)constitue unecontravention de 3ème classe pouvantentraîner le paiement d’une amende allantjusqu’à 450euros. En fonction des modali-tés de contrôle qui seront appliquées, cessanctions seront plus ou moins dissuasivescompte tenu du rendement locatif éven-tuel, escompté par le loueur. Lorsqu’il est adopté, ce dispositif remplacel’obligation de déclaration s’appliquantdans toutes communes et à tous meubléstouristiques ne constituant pas la résidenceprincipale du loueur(4).Une procédure permettant uncontrôle a posteriori par la com-muneCe dispositif n’a pas vocation à per-mettre un contrôle a priori maisdonne à la commune les moyensd’effectuer un contrôle a posteriori.En cela, il constitue un outil d’infor-mation précieux pour s’assurer durespect des différentes réglementa-tions applicables.Il permettra notamment aux com-munes de vérifier le respect de laréglementation de changement d’usage(5)puisque le fait de louer un local meublédestiné à l’habitation, de manière répétéeet pour une courte durée à une clientèle depassage qui n’y élit pas domicile, constitueun changement d’usage dès lors que lelocal principal ne constitue pas la résidenceprincipale du loueur, ou, s’il s’agit de sa rési-dence principale, lorsque la somme annuel-le des locations dépasse 120 jours. Le non-respect du changement d’usagepeut entraîner l’application de sanctionsnon négligeables et notamment une amen-de civile dont le montant peut atteindre50.000 par local irrégulièrement transfor-mé. Ce risque n’est pas théorique et cer-taines communes telles que Paris ont accruleur contrôle augmentant ainsi considéra-Alexandra Plain, avocate associée en droit immobilier, et Céline Quintin, avocateen droit immobilier chez Gowling WLG France proposent une analyse des pro-blématiques posées par les plateformes de location type Airbnb, alors que vientde se mettre en place l’obligation déclarative des locations saisonnières à Paris.ANALYSEL’analyse d’Alexandra Plain (Avocate associée) et de Céline Quintin (Avocate),chez Gowling WLG FranceLe meublé touristique dans le viseur de l’administrationAlexandra PlainCéline Quintinblement le nombre de condamnations pournon-respect du changement d’usage.Les obligations incombant auxplateformes Les plateformes collaboratives doiventdésormais(6)informer les loueurs des diffé-rentes réglementations applicables notam-ment en matière de changement d’usageou de déclaration. Elles doivent obtenir duloueur, préalablement à la mise en locationdu bien, une déclaration sur l'honneurattestant du respect de ces obligations etindiquant si le logement constitue ou nonsa résidence principale.Les plateformes doivent également veiller àce que le local ne soit pas loué plus de 120jours par an par leur intermédiaire si le localconstitue la résidence principale du loueur.Elles doivent décompter, « lorsqu’elles enont connaissance », le nombre de nuits eten informer annuellement la commune. Au-delà de 120 jours, la plateforme a l’obliga-tion de retirer l’offre de location. S’agissantde l’obligation de décompte, on peuts’interroger sur les raisons de l’utilisa-tion des termes « lorsqu’elles en ontconnaissance ».Le décret d’application devant préci-ser les modalités de contrôle et lessanctions relatives à certaines de cesobligations tarde à être publié. Onpeut regretter qu’aucune sanctionn’existe à ce jour en cas de non-res-pect de ces obligations alors même que dessanctions sont prévues à l’égard des loueurspar les différentes réglementations; les pla-teformes tirant également profit des loca-tions de courtes durées touristiques et nepouvant s’exonérer du respect de la loi.Face à la résistance des plateformes à res-pecter ces obligations et ayant constaté queseulement 1/5ème des offres publiées surAirbnb respectaient la procédure d’enregis-trement, la Mairie de Paris a indiqué mettreen demeure les plateformes, et vouloir sai-sir, sans attendre la publication du décret,les juridictions afin de les contraindre lesrécalcitrants à respecter la réglementation.A notre sens, une collaboration active entremairies et plateformes est primordiale pourencadrer efficacement et judicieusement leslocations meublées touristiques tout en pré-servant l’ensemble des intérêts en présence.A.P. et C.Q. (1) Article L324-1-1 du code de tourisme(2) Article D324-1 et suivants du code de tourisme(3) Article R324-1-2 du code de tourisme(4) I de l’article L324-1-1 du code de tourisme(5) Art. L631-7 du code de la constr. et de l’habitation(6) Article L324-2-1 du code de tourismeUnecollabora-tion activemairies -plateformesestprimordiale
qu'au sommet de l'édifice, situé plus de 2,50mètres au-dessus de la rupture de pente.L'égout du toit est positionné à la rupturede pente, à 1,70 mètre du plancher de cetespace, au-dessus des ouvertures ».Le Conseil d’État, se fonde sur l'article R111-2 du CCH fixant la surface minimale deslogements qui précise « qu'il n'est pas tenucompte de la superficie des combles nonaménagés […] et autres dépendances deslogements, ni des parties de locaux d'unehauteur inférieure à 1,80 mètre » et endéduit : « En jugeant, après avoir décrit sescaractéristiques, que cet espace constituait,non un troisième niveau au-dessus de rez-de-chaussée, mais un comble autorisé parles dispositions précitées de l'article U1 10.2du règlement du plan local d'urbanisme, lacour administrative d'appel de Bordeaux aporté sur les faits de l'espèce une apprécia-tion exempte de dénaturation et n'a pascommis d'erreur de droit ».Observations:Le Conseil d’État validedonc le permis de construire litigieux enadmettant que la hauteur du comble étantlimitée à 1,70 m au droit des façades, ellene correspondait pas à une surface habi-table mais à un comble autorisé. Le PLUqui limitait la construction à deux étagessur rez-de-chaussée plus comble était doncrespecté.Hauteur de construction. IGH. Lecas des duplex en niveau haut(CE, 1eet 6echambres réunies,6décembre2017, n°405839, société NacaratSaint Jean)Une société avait obtenu un permis deconstruire un immeuble de 19 étages pourune résidence étudiante, d'une hauteur de61 mètres, comportant 90 logements dontdeux appartements en duplex occupant les18eet 19eétages. Mais le permis avait étéannulé en première instance et en appel. LeConseil d’État rejette le recours du bénéfi-ciaire du permis.L'arrêt commence par admettre la recevabi-lité du recoursd'un voisin, appréciant plussouplement que pour d'autres requérantsson intérêt à agir:En se fondant sur l'article L 600-1-2 du codede l'urbanisme, l'arrêt indique: « Eu égard àsa situation particulière, le voisin immédiatjustifie, en principe, d'un intérêt à agirlors-qu'il fait état devant le juge, qui statue auvu de l'ensemble des pièces du dossier,d'éléments relatifs à la nature, à l'importan-ce ou à la localisation du projet de construc-tion.En jugeant que M. et MmeA., qui avaient jus-tifié être voisins immédiats de la construc-tion projetée par la production de l'acte depropriété du logement qu'ils occupent etqui s'étaient prévalus d'une obstruction,par la construction future, de la vue depuisce logement, avaient un intérêt à agircontre le permis de construire attaqué, letribunal administratif de Bordeaux n'a pascommis d'erreur de droit ».Sur le fond, le litige portait surla mesure dela hauteurimpliquant des règles spéci-fiques de protection contre l'incendie.LeConseil d’État cite l'article R 122-2 du CCHdéfinissant les immeubles de grande hau-teur comme ceux dont « le plancher bas dudernier niveau est situé, par rapport auniveau du sol le plus haut utilisable pour lesengins des services publics de secours et delutte contre l'incendie: / - à plus de 50mètres pour les immeubles à usage d'habi-tation ».Il mentionne ensuite l'arrêté du 31janvier1986 relatif à la protection des bâtimentscontre l'incendie. Ce texte a été modifié parl'arrêté du 19juin2015 pour préciser le casdes duplex et triplex. Il en résulte que « seulle niveau bas des duplex ou des triplex deslogements situés à l'étage le plus élevé estpris en compte si ces logements disposentd'une pièce principale et d'une porte paliè-re en partie basse… ».Mais le Conseil d’État écarte cette précision:« Il résulte des dispositions de l'article R.122-2 du CCH que la hauteur d'unimmeuble se mesure, pour l'application dela réglementation relative aux immeublesde grande hauteur, entre le niveau du sol leplus haut utilisable pour les engins des ser-vices publics de secours et de lutte contrel'incendie et le plancher bas du dernierniveau, qui désigne le plancher qui séparecelui-ci du niveau immédiatement inférieur.Ces dispositions doivent être comprisescomme visant le dernier niveau de l'im-meuble quand bien même celui-ci corres-pond à la partie supérieure d'un duplex oud'un triplex, sans qu'y fasse obstacle le par-ti que les auteurs de l'arrêté du 31janvier1986 précité ont cru pouvoir retenir en seréférant, à son article 1er, au " plancher basdu logement le plus haut ", et en précisant,au de son article3, le régime des duplexet triplex, au demeurant par des disposi-tions postérieures au permis de construireen litige ».L'arrêt évoque enfin l'hypothèse d'unerégularisation (art. L600-5 du code de l'ur-banisme) mais constate que le juge n'a pasété saisi d'une telle demande. Le recours estdonc rejeté.Observations:Le Conseil d’État fait doncune appréciation stricte des règles de hau-teur des bâtiments, au sens de la régle-mentation incendie, pour le cas du duplex.La hauteur du bâtiment doit être calculéeà partir du plancher de l'étage supérieurdu duplex (ou du triplex) et non à partirde l'étage bas, contrairement à ce que pré-voit l'arrêté du 19juin2015.Accélération des recours par unseul degré de juridiction. Champd'application(CE, 1e chambre, 8novembre 2017, n°409654,SAS Ranchère)Un maire avait opposé un sursis à statuer àune demande de permis de construire deuximmeubles de 24 logements à Mérignac. Lepétitionnaire avait demandé au tribunaladministratif d'annuler cette décision. Letribunal administratif ayant rejeté cettedemande, il se posait la question de savoir sile litige était susceptible d'appel ou si, enapplication de l'article R 811-1-1 du code dejustice administrative, il ne pouvait fairel'objet que d'un recours devant le Conseild’État.Le Conseil d’État interprète strictement ladérogation admise à titre temporaire, du1erdécembre 2013 au 1erdécembre 2018, etla juge ici inapplicable:« Ces dispositions [art. R 811-1-1], qui ontpour objectif, dans les zones la tensionentre l’offre et la demande de logementsest particulièrement vive, de réduire le délaide traitement des recours pouvant retarderla réalisation d’opérations de constructionde logements bénéficiant d’un droit àconstruire, dérogent aux dispositions dupremier alinéa de l’article R. 811-1 du codede justice administrative selon lesquelles:«Toute partie présente dans une instancedevant le tribunal administratif… peutinterjeter appel contre toute décision juri-dictionnelle rendue dans cette instance».Elles ne s’appliquent ni aux jugements sta-tuant sur des recours formés contre desrefus d’autorisation, ni aux jugements sta-tuant sur des recours formés contre desdécisions de sursis à statuer».Observations:Parmi les mesures visant àaccélérer le traitement des contentieux del'urbanisme figure celle qui supprime undegré de juridiction. Le tribunal administra-tif statue en dernier ressort et l'appel n'estpas ouvert. La règle déroge donc au princi-pe de l'article R 811-1 du code de justiceadministrative. Cette dérogation est admise18décembre 20176URBANISMEJURIShebdoimmobilierllJURISPRUDENCEsuite de la p.4suite p.8
18décembre 20177JURIShebdoimmobilierllTravaux de rénovation, travauxsur existants1. Ces dernières années, la rénovationd’immeubles dans leur ensemble est deve-nue un enjeu majeur pour les villes, per-mettant à la fois de lutter contre l’étale-ment urbain et d’améliorer la performanceénergétique des bâtiments. Or, en droit, qui dit travaux de rénovation,dit travaux sur « existants ». La spécificité des travaux de rénovation,par rapport à la réalisation d’ouvragesneufs, réside, en effet, dans la coexistence,au sein de l’immeuble rénové, de partiesneuves et de parties anciennes dénom-mées « existants »Dans le silence du législateur sur le régimeapplicable à ces travaux, la jurisprudenceest venue adapter les règles édictées pourla réalisation d’ouvrages neufs, afin dedéterminer ceux des travaux surexistants qui relèvent des garan-ties légales et des assurances obli-gatoires, et ceux qui relèvent dela responsabilité contractuelle dedroit commun et des assurancesfacultatives. L’article L.243-1-1 II du code desassurances a également apportédes réponses, en énonçant lesobligations en matière d’assurance.Le droit positif2. Ainsi, l’état du droit positif est le suivant.La jurisprudence applique le régime de laresponsabilité contractuelle de droit com-mun à la rénovation légère d’immeubles,sans modification structurelle (Civ. 3e20/01/2015, n°13-21122).En revanche, en cas de travaux de rénova-tion lourde, utilisant des techniques deconstruction, assimilables par suite à destravaux de construction d’un ouvrage, lajurisprudence admet l’application desgaranties légales (art. 1792 et suivants ducode civil) (Civ. 3e, 24/01/2001, 99-10538 ;Civ. 3e19/02/2004, n°Jurisdata 234800).Il n’y a toutefois pas de superposition entrele domaine des garanties légales, et celuides assurances obligatoires (dommages-ouvrage et responsabilité décennale) conçude manière plus restrictive.Ainsi, relèvent de la garantie décennale etdes assurances obligatoires, les désordressurvenant après réception, dans le cadrede travaux de rénovation lourde, dès lorsque:- ces désordres touchentla partie neuve del’ouvrageet portent atteinte à la soliditéou à la destination de l’ouvrage,- ces désordres touchentles existants deve-nus techniquement indivisibles de la partieneuve par suite d’incorporation, et portentatteinte à la solidité ou à la destination del’ouvrage (ex: effondrement, sous le poidsdu nouvel ouvrage de poutres anciennesintégrées, qui n’ont pas été traitées alorsqu’elles auraient dues l’être (erreur deconception)) (Civ.3e30 mars1994, n°92-11996 ; Civ. 3e14/09/2017, n°16-23020; art.L.243-1-1 II du code des assurances),- ces désordres résultent d’un vice propre àl’existant, et portent atteinte à la destina-tion de la partie neuve (ex: infiltrationdues au mauvais état de la toiture préexis-tante et non traitée lors des travaux)(Civ. 3e31/10/2001, n°99-20046; Civ.1ere27/05/2003, n°01-15854).Le risque lié aux travaux sur existantsest donc désormais pris en comptepar les polices d’assurances obliga-toires, notamment au niveau dumontant du plafond de garantie(hors habitation tout plafond estinterdit).Le plafond de garantie est ainsi égalau coût de la construction déclarée par lemaître de l’ouvrage, qui doit comprendre àla fois le coût de la réalisation des travauxet la valeur de reconstruction à neuf desexistants incorporés, dans une limite maxi-male de 150millions d’euros.La valeur de reconstruction à neuf des exis-tants n’est affectée d’aucun coefficient devétusté, ce qui est très intéressant pour lemaître de l’ouvrage.Enfin, les désordres auxexistants dissociésdu fait des travaux neufs (ex: fissures d’unmur ancien suite à des travaux de repriseen sous-œuvre), et qui portent atteinte à lasolidité ou à la destination de ces existants,relèvent également de la garantie décen-nale (Civ. 3e16/06/2009, n°08-12371; Civ. 3e13/12/2011; n°11-10014).En revanche, ces désordres ne sont pascouverts par les polices d’assurance obliga-toires (art. L.243-1-1 II du code des assu-rances).Par conséquent, le maître de l’ouvrageClaire Jouffrey, avocate en droit immobilier au Barreau de Lille, chez Fidal,analyse l’évolution de la jurisprudence en matière de garanties et d’assurancespour le cas spécifique des travaux sur existants.ANALYSEL’analyse de Claire Jouffrey (Avocate au Barreau de Lille, FIDAL)La rénovation d’immeubles:les spécificités en matière de garanties et assurancesEspéronsl’émergenced’un régimeunifién’est efficacement pro-tégé des désordres auxexistants dissociés ques’il souscrit des assu-rances facultatives.Les limites des assu-rances facultatives rési-dent toutefois dans lefait que, contrairementaux assurances obliga-toires:- les plafonds de garantie sont librementfixés,- la couverture assurantielle est souventlimitée aux désordres portant atteinte à lasolidité des existants, à l’exclusion de ceuxportant atteinte à leur destination,- un coefficient de vétusté est souventdéduit des indemnités versées.Position récente de la Cour decassation3. Il est intéressant de comparer cet état dudroit positif, en matière de travaux derénovation d’immeubles, avec la positionrécemment dégagée par la Cour de cassa-tion en cas de simple adjonction d’un élé-ment d’équipement à un ouvrage existant.En effet, la Cour de cassation considèredésormais que, lorsque les travaux neufsconsistent en une installation d’un élémentd’équipement sur un ouvrage existant (ex:installation d’une pompe à chaleur), lesdésordres à l’existant causés par ces travauxneufs relèvent de la garantie décennale s’ilsrendent l’ouvrage existant impropre à sadestination (ex: installation d’un insertayant provoqué un incendie endomma-geant l’immeuble existant) (Civ. 3e15/06/2017, n°16-19640; Civ. 3e14/09/2017,n°16-17232).Dans ce même cas les polices d’assurancesobligatoires sont mobilisables (Civ. 3e26/10/2017, n°16-18120). Ainsi, désormais:- les assurances obligatoires couvrent laréparation de l’existant dissocié, qui setrouve endommagé par l’installation d’unélément d’équipement, qui le rendimpropre à sa destination,- les assurances obligatoires sont exclueslorsque l’existant dissocié est atteint dans sasolidité ou sa destination par des travauxde rénovation d’ensemble.Cette position de la Cour de cassation poseun véritable problème de cohérence géné-rale du régime juridique applicable aux tra-vaux sur existant. Nous ne pouvons donc que regretter cettenouvelle jurisprudence, et espérer l’émer-gence d’un régime unifié, seul garant de laprévisibilité et de la sécurité juridique pourles intervenants à l’acte de construction etleurs assureurs.C. J. Claire Jouffrey
18décembre 20178JURIShebdoimmobilierllà titre temporaire, dans les seules com-munes relevant de la taxe sur les logementsvacants et pour les recours contre les permisde construire ou de démolir un bâtiment àusage principal d'habitation ou contre lespermis d'aménager un lotissement. Lesexceptions étant d'interprétation stricte, larègle de l'article R 811-1-1 ne s'étend pas unrecours contre un refus d'autorisation oucontre une décision de sursis à statuer (surce thème voir aussi l’arrêt du 8novembre,Jurishebdo n°704, p.4). À retenir:La suppression temporaire d'undegré de juridiction dans les zones tenduesne s'applique pas au recours contre unrefus de permis ou contre une décision desursis à statuer.Reconstruction d'un bâtimentdétruit par sinistre(CE, 2eet 7echambres réunies, 8novembre2017, n°403599)Une société avait déposé une demande depermis de construire et une demande depermis de démolir pour la réhabilitation etl'agrandissement d'une maison. Le maireavait accordé le permis de démolir maisrejeté la demande de permis de construire.Le pétitionnaire avait démoli la maison,puis sollicité une nouvelle demande de per-mis pour la seule reconstruction. Nouveaurefus du maire, confirmé en première ins-tance et en appel.Mais le Conseil d’État donne gain de causeau pétitionnaire, en se fondant sur l'articleL 111-3 du code de l'urbanisme dans sarédaction alors applicable.Cet article autorise la reconstruction àl'identique d'un bâtiment détruit ou démo-li par sinistre.« Considérant qu'aux termes de l'article L.111-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédac-tion en vigueur à la date des arrêtés liti-gieux: « La reconstruction à l'identique d'unbâtiment détruit ou démoli depuis moins dedix ans est autorisée nonobstant toute dis-position d'urbanisme contraire, sauf si la car-te communale, le plan local d'urbanisme oule plan de prévention des risques naturelsprévisibles en dispose autrement, dès lorsqu'il a été régulièrement édifié.»; qu'ilrésulte de ces dispositions que, dès lorsqu'un bâtiment a été régulièrementconstruit, seules des dispositions expressesde la réglementation locale d'urbanismeprévoyant l'interdiction de la reconstructionà l'identique de bâtiments détruits parsinistre ou démolis peuvent faire légalementobstacle à sa reconstruction ».En conséquence, en validant le refus d'au-toriser la reconstruction, et alors que, sur lazone concernée, étaient admises les recons-tructions à l'identique en cas de sinistre, lacour d’appel avait commis une erreur dedroit.Observations:L'article L111-3 du code del'urbanisme autorise donc la reconstructionsous trois conditions:- l'immeuble détruit doit avoir été réguliè-rement édifié,- le document d'urbanisme ne doit pasexclure la faculté de reconstruction,- la destruction doit être due à un sinistre,accidentel ou résulter d'une catastrophenaturelle (cela a par exemple été admis àla suite des tempêtes de 1999, CAA Nancy,1erjuin 2006), ce qui n’est pas le cas si l'ef-fondrement est à des travaux de réha-bilitation (CAA Versailles, 15janvier 2009),ou si la démolition est la conséquenced'une absence d'entretien de l'immeubleou d'un délabrement préexistant (CAAParis, 12février 2010).Par ailleurs, les travaux de surélévationd'une maison de plain-pied ne constituentpas une reconstruction à l'identique (CAABordeaux, 3février 2012). Une réponseministérielle a précisé que les auteurs d'undocument d'urbanisme qui veulent interdi-re la reconstruction à l'identique doivent yprocéder explicitement et le justifier pourdes raisons d'urbanisme, de protectiond'un lieu ou de sécurité, en fonction de lasituation de la zone concernée (JOAN 5nov. 2013, p.11616).Les dispositions de l'article L111-3 sontdésormais transférées aux articles L 111-15et L 111-23 du code de l'urbanisme.FiscalitéTaxe foncière. Dégrèvementpour des travaux d'économied'énergie dans des logementssociaux. Règles d'imputation(CE, 28eet 3echambres réunies, 22novembre2017, SA d'HLM Espace Domicile, n°392531)Une SA d'HLM demandait le dégrèvementde taxes foncières au titre de travaux d'éco-nomie d'énergie engagés sur desimmeubles. Or le tribunal avait partielle-ment rejeté sa demande.L'article1391 E du CGI dans sa version appli-cable en 2011 prévoit la faculté de déduirele quart des dépenses d'économie d'énergiedu montant de la taxe foncière. Le solde desdépenses déductibles est, le cas échéant,imputé sur les cotisations des immeublesimposés dans la même commune ou dansune commune relevant du même servicedes impôts au nom du même bailleur et autitre de la même année.L'arrêt statue d'abord sur la recevabilitédela demande. Le jugement qui avait rejeté lademande d'imputation est censuré aumotif que la demande de la SA d'HLM:« tendait à obtenir que soit reconnue l’exis-tence de dépenses ouvrant droit à imputa-tion sur les impositions d’autres immeublesqu’elle possède dans des communes, men-tionnées dans sa réclamation et situéesdans le périmètre géographique » men-tionné à l'article 1391 E.Sur le fond, le Conseil d’État censure la déci-sion du tribunal qui avait rejeté lesdemandes de dégrèvement au motifqu'elles n'étaient pas indissociables desdépenses exposées pour la réalisation destravaux d'économie d'énergie. Il s'agissaitdes travaux suivants:- frais de dépose et d’évacuation desdéchets, - coût de la main-d’œuvre pour la déposedes ouvrants et dormants, - frais de dépose des rampants, de coffresdes persiennes et des portes, - dépenses de fourniture et de pose desmenuiseries extérieures, - postes relatifs au robinet manuel, auURBANISME- FISCALITÉreproduction interdite sans autorisationJURISPRUDENCETaxe foncière: pas d'exonéra-tion pour des immeubles affectésà un syndicat