Au sommaire :
– 2 – Interview –
Sidonie Fraiche-Dupeyrat (LPA-CGR) et Florence Semelin (JLL). Politique du logement: quel impact pour les investisseurs?
– 5 – Jurisprudence –
VEFA : Délai de prescription pour le paiement du solde du prix
Fiscalité : CFE : exonération, dans une ZUS, pour un transfert d’activité
Taxe sur les bureaux en Ile-de-France : exonération pour locaux d’enseignement / Taxe sur les terrains nus rendus constructibles : calcul en cas de division d’un terrain
Urbanisme :
Aménagement : Schéma d’aménagement de plage. Pas de recours contre la délibération du conseil municipal arrêtant le projet
Permis de construire : Fraude dans la fourniture de l’attestation sur la qualité du demandeur. Faculté de retrait / Association : intérêt à agir contre un permis de construire / Annulation partielle du permis / Exigence de produire le justificatif d’une servitude de cour commune
Certificat d’urbanisme : Sursis à statuer sur une demande ultérieure de PC sur le fondement du futur PLU
Urbanisme commercial : Rôle des CDAC
PPR naturels / DALO : un délai d’attente de 13 ans
– 10 – A l’Assemblée –
Le projet de loi de finances à l’Assemblée
1. Construction >Quelles sont les mesures marquantes qui ont été prises pour favoriser la construction de logement? Florence Semelin : “Le Gouvernement s’est fixé trois objectifs: créer un choc d’offre par la relance de la construction, comptant en obtenir une baisse des prix et des loyers, stabiliser les normes, pour évi- ter une hausse du coût des logements et libérer le foncier. Sidonie Fraiche-Dupeyrat : “La produc- tion de normes a connu deux phases. D’abord une phase de forte production, qui a touché la réglementation thermique, l’accessibilité ou la sécurité des ascenseurs. Ce pic de production de normes a culminé il y a cinq ans. Si certaines ont pu être édic- tées sous le coup de l’émotion, à la suite d’accidents (comme pour les ascenseurs), la plupart ne sont pas remises en cause dans leur principe. Puis en 2012 ou 2013, il y a eu une prise de conscience. Elle a donné lieu à la création du conseil supérieur de l’efficacité énergé- tique et à l’obligation de réaliser une étude d’impact avant la création d’une norme nouvelle et à l’adoption d’une dizaine de mesures de simplification. Le nouveau Gouvernement propose d’aller plus loin; il entend arrêter la production normative et quitter la logique de moyens, au profit d’une logique de résultat. >… ce qui devrait induire une refonte très générale du CCH… S. F-D. : “C’est en effet une très profonde réforme, une vraie révolution politique, car elle consiste à fixer des objectifs (par exemple en termes d’accessibilité des loge- ments), tout en laissant aux acteurs le choix des moyens pour les atteindre. Le Prési- dent Macron a plusieurs fois évoqué cette réforme et a reconnu qu'elle pouvait dans un premier temps heurter les associations de défense des personnes handicapées, mais il juge nécessaire d’en passer par là. >En matière fiscale, quelles sont les mesures incitatives? S. F-D. : “Les mesures incitatives tradition- nelles sont souvent de même nature mais plus ou moins ciblées. Elles consistent en une exonération d’impôt sur les plus- values pour la vente de foncier et sont ciblées sur certains acquéreurs, comme les collectivités locales qui projettent de construire du logement social. Le projet actuel est plus large: il prévoit d’exonérer totalement de plus-values les ventes de terrains aux bailleurs sociaux et de les exonérer en partie pour une cession en vue de construction de logements inter- médiaires (85%) ou de logements libres (70%). La mesure est bien calibrée, limitée dans le temps (3 ans) et circonscrite aux zones ten- dues ce qui doit contribuer à un effet de déstockage. F. S. : “Le projet de loi de finances poursuit par ailleurs le dispositif Pinel pour 2018 et finalement, d’après le texte voté par les députés, sur un zonage un peu élargi. S. F-D. : “Les Parlementaires cherchent à concilier la néces- sité de produire davantage pour soutenir l’activité économique et cel- le d’éviter de construire trop dans des zones non tendues. >Le droit de l’urbanisme a aussi beau- coup évolué ces dernières années S. F-D. : “Le législateur a produit beaucoup de lois en dix ans! Signalons qu’il a favori- sé le développement de l’urbanisme de projet avec la PIL (procédure intégrée pour le logement), qui facilite la mise en confor- mité du PLU et des documents d’urbanis- me supérieurs pour favoriser la production de logements. Il a aussi multiplié les bonus de constructi- bilité, en faveur du logement intermédiaire ou du logement social. Mais ces méca- nismes supposant, pour être opérationnels, d’être adoptés par une décision des collec- tivités territoriales, ils ont eu un effet limi- té. Sur ce point, le projet logement du Gou- vernement comporte l’affichage d’objec- tifs, mais leurs modalités pratiques d’ap- plication ne sont pas encore fixées. 7 novembre2017 2 S IDONIE F RAICHE D UPEYRATET F LORENCE S EMELIN INTERVIEW Politique du logement: quel impact pour les investisseurs ? Après les annonces du Gouvernement sur sa politique du logement en septembre et alors que se prépare une loi pour le logement pour 2018, quel pourra être l’impact de ces mesures sur le marché et sur les investisseurs? Regard croisé de Sidonie Fraiche- Dupeyrat, avocat associée intervenant notamment dans le champ résidentiel chez LPA-CGR avocats et de Florence Semelin, directeur adjoint du pôle résidentiel au sein du Département Investissement de JLL. Avec ce regard croisé, l’avocat et le conseil se livrent à une analyse des mesures prises par les Gouvernements précédents au cours des dix dernières années et leur impact sur le marché, puis tentent de voir quel pourrait être l’effet des mesures envisagées. L’analyse se focalise autour de quatre domaines: la construction, le parcours locatif, le logement intermédiaire et l’innovation. Sidonie Fraiche- D upeyrat Florence S emelin Logements neufs en France Évolution des prix et du nombre de loge- ments mis en chantier Source: JLL Évolution du nombre de loge- ments mis en chantier en France Indice des prix Nombre de logements mis en chantier Évolution des prix des loge- ments neufs en France
>Quelles mesures attendre pour lutter contre les recours abusifs? S. F-D. : “De nombreuses mesures ont déjà été adoptées, mais n’ont rencontré qu’un effet limité. Ma consœur Hélène Cloez confirme que le contentieux de l’urbanis- me n’a pas baissé et que les condamnations à dommages-intérêts pour recours abusifs sont rarissimes. Ici encore, le Gouverne- ment souhaite agir mais n’a pas dévoilé le détail des mesures envisagées. Il pourrait être décidé de supprimer un degré de juri- diction dans certains cas ou d’imposer au justiciable de grouper ses moyens en début de procédure. Enfin, la production de logements a été soutenue par le développement de diverses formes de démembrement de pro- priété, comme celle promue par Perl par exemple. F. S. : “Nous arrivons à l’échéance de 15 ans des premiers contrats, mais le dénouement des opérations semble bien se dérouler. Ce type de montage a vocation à se dévelop- per et son champ d’application à s’élargir. D’une part, il pourrait notamment s’appli- quer aux logements intermédiaires et d’autre part, alors qu’il a démarré pour des investisseurs personnes physiques, il pour- rait intéresser des investisseurs institution- nels. Mais cette évolution n’appelle pas nécessairement d’évolution législative. >L’ensemble des mesures prévues peut-il avoir un impact sur les prix? F. S. : “L’idée avancée par le Gouvernement étant de provoquer un choc d’offre pour entraîner une diminution des prix de construction, et des loyers, nous avons comparé l’évolution des prix dans le neuf et celle de la construction de logements depuis dix ans. Il s’agit certes de données nationales qui mériteraient un regard plus approfondi par zone géographique plus ou moins tendues en termes de marché, mais cela donne néanmoins une première idée. On observe donc que lorsque la production de logements a diminué, les prix sont res- tés relativement stables, tandis que lorsque la production de logements a progressé les prix ont suivi la même tendance (cf. gra- phique). Toutefois, il faut ajouter que le niveau de production sur cette période n’a jamais dépassé l’objectif de 500000 logements, chiffre qui est fondé sur les besoins nou- veaux liés à l’évolution démographique et au taux de décohabitation (de 0.75% selon l’INSEE). On pourrait donc avancer l’idée que dans la mesure où nous sommes loin de l’objectif de 500000, qui serait bien évi- demment constaté dans les zones tendues, une hausse de la production ne suffit pas à faire baisser le prix. Reste à savoir si en atteignant cet objectif, les prix des loge- ments se mettraient à baisser. Quoi qu’il en soit, pour produire davanta- ge il faut libérer le foncier. Les terrains ne manqueraient pas, y compris en Ile-de- France, en première et deuxième couronne parisienne, mais ils seraient « bloqués ». Le blocage tient à des raisons fiscales, mais aussi parfois aux collectivités locales qui privilégient le développement tertiaire en lieu et place du logement. La baisse annon- cée de la taxe d’habitation ne fait que ren- forcer cette tendance. Les réformes d’urbanisme vont dans le bon sens et devraient inciter les collectivités à construire davantage, d’autant que l’État peut intervenir face aux communes réti- centes, par exemple en mettant en place une opération d’intérêt national. S. F-D. : “Le Gouvernement souhaite inté- resser les collectivités au développement du logement, c’est en effet une clé du déblocage. Dans la ligne des précédents, le Gouverne- ment a clairement affiché sa volonté d’agir; les outils existent, il faut les mettre en œuvre et les hiérarchiser. F. S. : “Le lien entre évolution de la construction et celle des prix est lié aux normes de construction et aux coûts du foncier. Un foncier disponible rare fait monter les prix. Ajoutons que si le rôle des collectivités est fondamental, le territoire est loin d’être homogène. 2. Le régime des baux >Le régime des baux a été plus stable que le droit de l’urbanisme… jusqu’en 2014. S. F-D. : “Si les règles locatives avaient peu évolué jusqu’en 2013, l’année 2014 a été décoiffante! Jamais la loi de 1989 n’avait autant été modifiée. Le focus a été porté sur les loyers. Face à une forte tension du marché locatif, les pouvoirs publics ont voulu bloquer le thermomètre. Ils ont vou- lu “rééquilibrer” les rapports locatifs, ce qui s’est traduit notamment par la sup- pression des clauses pénales ou l’élabora- tion d'un bail type, soit des mesures le plus souvent favorables au locataire. Après l’interdiction pour les personnes morales d’exiger une caution (en 2008), il y a eu une volonté de redonner confiance aux bailleurs. D'où la création de disposi- tifs alternatifs de sécurisation du bailleur comme Visale et, pour les étudiants, de Clé. Le Président Macron ayant souhaité sur ce sujet de la stabilité, il n’est pas prévu de mesure de réforme de la loi de 1989. Le Gouvernement entend prendre de la dis- tance face au mécanisme d’encadrement des loyers. Il n’est plus envisagé de l’étendre mais il est prévu d’en observer les effets à Paris et à Lille, voire de l’abroger. Toutefois, en faisant appel du jugement du tribunal administratif de Lille annulant l’arrêté de fixation des loyers de référence, le Gouvernement a dépassé le stade de la simple observation. >Il est toutefois prévu un bail de courte durée. Qu’en pensez-vous? S. F-D. : “Ce bail devrait être compris entre un et dix mois, réservé aux personnes en mobilité professionnelle, en formation, ain- si qu’aux apprentis, et aux stagiaires. Ce doit être un contrat sans dépôt de garantie, éligible au dispositif Visale et surtout, non renouvelable. On peut se demander si le bailleur, redou- tant à l’échéance une transformation en bail de droit commun, ne va pas être incité à demander systématiquement au locataire de quitter les lieux. La flexibilité gagnerait à être admise pour une durée un peu plus longue. Vu la motivation claire des pou- voirs publics, il est douteux qu’on puisse admettre la faculté pour le locataire en pla- ce de renoncer à la transformation d’un tel contrat court en bail de droit commun s’il reste dans les lieux. Le caractère non renouvelable du contrat risque d’être un obstacle à son succès. >Le projet comporte d’autres mesures sur le logement social. S. F-D. : Le projet vise aussi à favoriser la mobilité dans le parc social en créant un dispositif de contrôle des conditions d’oc- cupation des locataires tous les six ans. 7 novembre2017 3 S IDONIE F RAICHE D UPEYRATET F LORENCE S EMELIN INTERVIEW
Le taux de mobilité des locataires dans le parc social étant très inférieur à celui du parc privé, le Gouvernement souhaite le faire augmenter. Mais ce sont des mesures au long cours d’autant que le dépassement des plafonds de ressources peut se produi- re rapidement après l’entrée dans les lieux et le contrôle seulement six ans plus tard. >Quid de la réforme des APL? F. S. : “L’enjeu de la réforme est de savoir si les APL ont un effet inflationniste sur les loyers. Nous avons comparé sur dix ans l’évolution globale des loyers (publics et privés) avec celle des aides au logement (APL et aides au logement familial et social). Or si le montant des loyers a fortement progressé de 2005 à 2016, la part des APL est restée constante, aux alentours de 25% (cf. graphique). Le mécanisme de calcul des APL fait que leur montant augmente avec la hausse des loyers. Mais leur hausse est-elle la consé- quence ou la cause de la hausse des loyers? La question demeure. Le volume des aides, 18 milliards d’euros, est certes conséquent par rapport aux 40 milliards consacrés au logement, et nous avons comparé les budgets que consacrent l‘Allemagne et le Royaume Uni dans l’aide au logement. Il en résulte que les pays où les marchés sont les plus tendus sont aussi ceux ou l’aide publique est la plus impor- tante. Le Royaume Uni consacre plus d’ai- de au logement que la France. L’Allemagne dépense 20 milliards d’euros d’aide contre 40 pour la France. Ici encore la question est de savoir si la ten- sion du marché impose d’y consacrer des fonds importants ou si l’importance de l’ai- de pousse les loyers à la hausse. Ce pre- mier constat très général, certes intéres- sant, imposerait toutefois une étude bien plus poussée tenant compte notamment des spécificités de chaque pays concernant les conditions démographiques, celles du parc immobilier et de la concentration plus ou moins forte des zones urbaines. S. F-D. : “Le Gouvernement prévoit d’élar- gir le dispositif Visale notamment en aug- mentant les seuils de revenus permettant d’y accéder, et d’améliorer les niveaux d’indemnisation. 3. Le logement intermédiaire >Quels sont les objectifs de construction de logements intermédiaires? F. S. : “La SNI a comme objectif de construi- re 35000 logements de2015 à2020. Pour ce faire, elle a fédéré 17 investisseurs institu- tionnels avec le FLI, ce qui a été une oppor- tunité pour ces acteurs d’investir dans le logement, mais de façon indirecte, et dans un produit dont les loyers correspondent à une demande forte, en zone tendue, entre les loyers sociaux et les loyers de marché. Aujourd’hui, le Groupe Action Logement, a pour objectif de construire 100000 loge- ments en 5 ans via IN’LI.. S. F-D. : “Les collecteurs de la participation des employeurs à l’effort de construction ont été regroupés. Action Logement est désormais organisée en deux structures. Une structure unique assure la collecte et une autre structure investit et détient le patrimoine. L’aide au logement intermédiaire se tra- duit par un taux de TVA réduit à 10% et une exonération de taxe foncière pendant 20 ans. Le plan du Gouvernement est de dévelop- per le logement intermédiaire en suppri- mant ou assouplissant une règle actuelle contraignante: l’obligation de construire 30% de logements sociaux dans le pro- gramme de logements intermédiaires. Cet- te règle a parfois pour effet de déséquili- brer les opérations. 4. Innovation >Le sujet est-il spécifique au logement? S. F-D. : “On peut se demander s’il faut une loi spécifique à l’innovation. Mais les pouvoirs publics ont innové par différents moyens. Ils ont favorisé la colocation en créant un nouveau régime qui limite la solidari- té du locataire sortant et de sa caution. Ils ont permis de louer un logement avec plusieurs baux pour autoriser des échéances différentes, ce qui n’est pas sans susciter des questions pratiques sur le dépôt de garantie, l’état des lieux ou la répartition des réparations loca- tives. Pour l’avenir, il faudrait sans doute faciliter la colocation par multibaux. La loi est aussi intervenue dans le régi- me des résidences services, et sans limiter son objet aux résidences seniors, contraire- ment à ce que l’intégration de la réforme dans la loi sur le vieillissement pourrait laisser supposer. Mais le dispositif comporte des freins notamment en raison des la définition des services non individualisables qui peuvent être refacturés au locataire (accueil, sécuri- té renforcée…) et au fait que le régime est limité au bailleur titulaire d’un bail com- mercial qui exploite toute la résidence. Rien n’est en l’état prévu par le Gouverne- ment sur ces sujets, il y a pourtant quelques mesures d’accompagnement qui seraient bienvenues. Le plan du Gouvernement veut dévelop- per la “construction 2.0”, notamment par l’accélération de l’installation de la fibre dans les logements ou la généralisation de la conception numérique du bâtiment Le dépôt des permis de construire devrait aussi être dématérialisé et la maquette numérique facilitée. F. S. : “Il faut souligner l’intérêt des inves- tisseurs envers les résidences gérées. Ils y voient un actif de diversification. Les pre- miers investissements en bloc en rési- dences senior ne remontent qu’à fin 2012 et ont connu depuis une très forte croissance. Et pourtant ces résidences, de même que les résidences étudiants, sont occupées par des ménages aux ressources plus contraintes que les ménages actifs. En effet, on observe qu’aucun produit immobilier spécifique n’existe pour la génération intermédiaire, qui représente une popula- tion d’actifs avec un pouvoir d’achat plus élevé et demandeuse de services. En revanche, on observe déjà certains acteurs, promoteurs et investisseurs y réfléchir acti- vement. ● 7 novembre2017 4 S IDONIE F RAICHE D UPEYRATET F LORENCE S EMELIN INTERVIEW Part des APL dans le total des loyers en milliards d’ € Source: JLL Total des loyers du parc privé et social en milliards d’ € Total des aides personnelles au logement en milliards d’ €
7 novembre2017 5 V ENTE - F ISCALITÉ ▲ Vente VEFA ■ Délai de prescription pour le paiement du solde du prix (Civ. 3 e , 26octobre 2017, n°1107, FS-P+B+I, rejet) Une société avait vendu un appartement en l'état futur d'achèvement. Le délai de livrai- son était fixé au 1 er trimestre 2005 et l'ap- partement avait été livré en février2006. Assigné en paiement pour le solde du prix de 5178euros, l'acquéreur avait opposé une fin de non-recevoir tiré de la prescrip- tion. La cour d'appel avait admis cet argu- ment et la Cour de cassation confirme la décision: « Mais attendu qu'ayant relevé que l'article L 137-2, devenu L 218-2 du code de la consommation disposait que l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans, la cour d'appel a rete- nu, à bon droit, que ce texte, de portée générale, avait, en l'absence de dispositions particulières, vocation à s'appliquer à l'ac- tion de la société Eurofoncier, profession- nelle de l'immobilier, en paiement du solde du prix de l'immeuble vendu en l'état futur d'achèvement à M me M. ». Le pourvoi est rejeté. Observations : L'article L 137-2 a été créé par la loi du 17juin 2008 réformant la prescription. Il prévoit un délai de prescrip- tion de deux ans pour les actions entre professionnels et consommateurs. La cour d'appel en avait relevé le caractère très g énéral et l'avait jugé applicable à la VEFA. Avant la loi de 2008, le délai de prescription pour une action en paiement du solde du prix de vente en VEFA était de trente ans, délai de droit commun. Le nou- veau délai est entré en vigueur immédiate- ment (application de l'article 2222 al. 2 du code civil pour les réductions de délai de prescription), il était donc applicable à la vente conclue en 2004. La cour d'appel avait relevé que le délai expirait le 21juin 2010 (le 19juin étant un samedi). L'assi- gnation engagée par le vendeur fin août 2010 était donc tardive. Le raisonnement est donc validé par la Cour de cassation. A retenir: Le délai de prescription de deux ans s'applique aux actions en paiement du solde du prix du bien vendu en VEFA, entre professionnels et consommateurs. Fiscalité Fiscalité locale ■ CFE: exonération, dans une ZUS pour un transfert d'activité (CE, 8 e et 3 e chambres réunies, 25octobre 2017, n°404989) Une société était implantée dans le 3 e arrondissement de Paris et avait déménagé dans le 10 e alors situé dans une zone urbai- ne sensible. À ce titre, elle avait demandé un remboursement de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (art. 1586 nonies et art. 1466 A du CGI). La cour administrative d'appel avait fait droit à sa demande et le Conseil d’État confirme la décision: « les dispositions précitées du I de l'article 1466 A du code général des impôts ont pour objet de favoriser le développement des zones urbaines sensibles par la création ou l'extension d'activités économiques dans ces zones. Il en résulte que, pour l'applica- tion de ces dispositions, le transfert d'un établissement, y compris à l'intérieur du ter- ritoire d'une même commune ou d'un même établissement public de coopération intercommunale à fiscalité professionnelle unique, d'un lieu non situé dans une zone urbaine sensible vers un lieu situé dans une telle zone doit être regardé comme une création d'établissement ». Observations : L'article 1466 A du CGI per- met à une commune d'exonérer de cotisa- tion foncière des entreprises (CFE) les entre- prises qui s'installent dans le périmètre d 'une zone urbaine sensible. Les entreprises peuvent alors demander l'exonération de CVAE (art. 1586 nonies). Il résulte de cet arrêt que le transfert d'activité fait partie des opérations qui ouvrent droit à l'exoné- ration, y compris lorsque l'activité était déjà implantée dans la commune, mais dans un autre secteur. La décision s'appuie sur la considération que l'objet de l'exonération est de favoriser le développement de ces zones. Un transfert d'activité, même issue de la même commune, y contribue. Taxe sur les bureaux en Ile-de- France ■ Exonération pour locaux d'ensei- gnement (CE, 11octobre 2017, 9 e et 10 e chambres, n°392999, SCI 10-12 Lyautey) Une société demandait à bénéficier de l'exonération de la taxe sur les bureaux en Ile-de-France pour des locaux situés à Paris (16 e ) et utilisés pour l'enseignement, en invoquant l'article L 231 ter V 2e du CGI. Cet article prévoit notamment l'exonération pour les locaux à caractère éducatif. Le Conseil d’État lui donne gain de cause, censurant la décision de la cour administra- tive d'appel. Il indique que : « Pour l’application des dispositions du 2° du V de l’article 231 ter du CGI citées ci-des- sus, doivent être regardés comme des locaux spécialement aménagés pour l’exer- cice d’activités à caractère éducatif les salles de cours, d'étude et les amphithéâtres des établissements d'enseignement ou de for- mation initiale ou continue, ainsi que les locaux aménagés pour certains types d’en- seignement comme, notamment, les labo- ratoires de langue ou les salles informa- tique ». Les locaux en cause comprenaient un amphithéâtre, des salles de cours, plusieurs studios radio et un studio télévision d’enre- gistrement ainsi qu’une salle informatique. La cour d'appel avait considéré que ces locaux avaient un caractère modulable et n’étaient donc pas exclusivement adaptés, de par leur conception même, à cet exerci- ce. Mais le Conseil d’État juge que, ce fai- sant, « la cour a subordonné le bénéfice de l’exonération en litige à une condition non prévue par l’article 231 ter du code général JURISPRUDENCE Pour vous abonner à Jurishebdo, avec 20% de réduction pour un premier abonnement, visitez notre site internet jurishebdo.fr ABONNEMENT «PRIVILEGE» 20% de réduction sur l’abonnement JURIS hebdo immobilier
des impôts et, ainsi, commis une erreur de droit ». Observations : Le Conseil d’État apporte d onc une appréciation souple de la condi- tion d'exonération de la taxe sur les bureaux, prévue par l'article 231 ter du CGI en faveur de locaux utilisés pour l'éduca- tion. Il n'est pas nécessaire que les locaux ne soient pas modulables. Il suffit donc qu'ils soient effectivement utilisés pour une activité d'enseignement. Taxe sur les terrains nus rendus constructibles ■ Calcul en cas de division d'un terrain (CE, 3 e et 8 e chambres, 11octobre 2017, n°400766) Le propriétaire d'un terrain de 16854m 2 avait cédé en 2012 deux parcelles de 620m 2 chacune, issues de la division de ce terrain. L'administration avait soumis les ventes à la taxe sur la cession de terrains devenus constructibles (art. 1605 nonies du CGI), ce que contestait le propriétaire. Il avait obte- nu gain de cause en première instance, mais ni en appel, ni devant le Conseil d’État. Cet arrêt précise le mode d'application de la taxation lorsque le terrain est issu de la divi- sion d'une parcelle plus grande: « pour apprécier la constructibilité d’un ter- rain en vue d’appliquer la taxe sur la cession à titre onéreux, dans le cas où ce terrain est issu de la division d’une parcelle plus éten- due, il convient de ne prendre en compte que la constructibilité de ce terrain objet de la cession et non celle de la parcelle dont il est issu . Par suite, ayant constaté que cha- cun des deux terrains cédés par M. et M me A. n’était pas lui-même constructible, anté- rieurement au 13janvier 2010, en vertu des règles de la zone NB du POS à laquelle appartenait la parcelle dont il est issu, alors même qu’il existait une possibilité de construction sur cette parcelle, et qu’il n’était devenu constructible qu’après l’en- trée en vigueur, en mai 2011, d’un PLU du fait de son classement en zone UE, la cour a ni commis d’erreur de droit ni inexactement qualifié les faits dont elle était saisie en jugeant que chacune de ces cessions était soumise à la taxe prévue par l’article 1605 nonies du CGI ». Observations : L'article 1605 nonies soumet à une taxe la cession de terrains nus deve- nus constructibles du fait de leur classe- ment, après le 13janvier 2010, par un PLU ou autre document d'urbanisme en zone urbaine ou à urbaniser ouverte à l'urbani- sation. La taxe est exigible lors de la pre- m ière cession à titre onéreux intervenue après que le terrain a été rendu construc- tible. En l'espèce, le terrain d'origine avait une possibilité de construire mais non les ter- rains issus de la division. Selon cet arrêt, les parcelles cédées en 2012 devaient donc être considérées comme non constructibles avant le 13janvier 2010, puis rendues constructibles par le nouveau PLU en 2011, et donc soumises à la taxe. Par ailleurs, il résulte implicitement de cet- te décision qu'un litige sur cette taxe relè- ve de la compétence du juge administratif. A retenir: En cas de division, le caractère constructible du terrain cédé doit être apprécié en lui-même et non en référence à la totalité du terrain d'origine. Urbanisme Aménagement ■ Schéma d'aménagement de pla- ge. Pas de recours contre la délibé- ration du conseil municipal arrê- tant le projet (CE, 6 e et 1 e chambres réunies, 9 oct. 2017, n°396801, Association des exploitants de la plage de Pampelonne) Le conseil municipal de Ramatuelle avait arrêté le projet d'aménagement de la plage de Pampelonne en 2012. Après enquête publique, le conseil municipal avait arrêté le projet modifié en 2014, puis en 2015. Le projet avait donné lieu à un décret en Conseil d’État en décembre2015. Une asso- ciation demandait l'annulation du décret et des délibérations préalables du conseil municipal. Le Conseil d’État indique que la procédure d'adoption est régie par l’article R 146-3 (devenu R 121-7) du code de l'urbanisme et précise la portée des décisions qui précè- dent le décret en Conseil d’État: « Considérant que les délibérations atta- quées du conseil municipal de Ramatuelle ont eu pour seul objet, en application des dispositions citées ci-dessus des articles L. 146-6-1, R. 146-3 et R. 146-4 du code de l'ur- banisme, d'arrêter le projet du schéma d'aménagement de la plage de Pampelon- ne soumis à une approbation par décret en Conseil d’État, sans emporter par elles- mêmes d'autre effet juridique que de per- mettre cette approbation, qui seule fait l'objet des mesures de publicité auxquelles s ont subordonnés les effets juridiques du schéma d'aménagement de plage; qu'elles revêtent, dès lors, le caractère de mesures préparatoires, insusceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir; que la commune de Ramatuelle est, dès lors, fon- dée à demander le rejet comme irrece- vables des requêtes de l'association requé- rante tendant à leur annulation ». Le Conseil d’État rejette par ailleurs le recours engagé contre le décret lui-même et indique notamment que le schéma d'aménagement de plage litigieux n'était pas incompatible avec le schéma de cohé- rence territoriale des cantons de Grimaud et Saint-Tropez. Observations : Pour contester la validité d'un schéma d'aménagement de plage, il convient donc de porter le recours contre le décret en Conseil d’État qui l'approuve, et non contre les délibérations antérieures du conseil municipal. Il s'agit de mesures préparatoires non susceptibles de recours. Permis de construire ■ Fraude dans la fourniture de l'at- testation sur la qualité du deman- deur. Faculté de retrait (CE, 6 e et 1 e chambres, 9octobre 2017, n°398853, Société Les Citadines) Une société avait obtenu le 28juin 2012 un permis de construire un immeuble de 16 logements et un commerce. Le permis valait aussi permis de démolir des bâtiments. Or le maire avait retiré ce permis le 21septembre 2012. Le maire s'était fondé sur une fraude sur la qualité du demandeur. Le Conseil d’État confirme le bien-fondé de la décision du maire. L'arrêt se fonde sur l'article R 431-5 du code de l'urbanisme selon lequel le péti- tionnaire doit attester qu'il remplit les conditions de l'article R 423-1, c'est-à-dire être propriétaire du terrain, mandataire ou autorisé par eux à exécuter les travaux. L'arrêt précise le rôle de l'administration: « le pétitionnaire qui fournit l’attestation prévue à l’article R. 423-1 du code doit être regardé comme ayant qualité pour présen- ter sa demande; que, lorsque l'autorité sai- sie d'une demande de permis de construire vient à disposer, au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d’ins- truction lui permettant de les recueillir, d’in- 7 novembre2017 6 F ISCALITÉ - U RBANISME ▲ JURISPRUDENCE
formationsde nature à établir son caractè- re frauduleux , il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif ; qu’en- fin, si postérieurement à la délivrance du p ermis de construire, l’administration a connaissance de nouveaux éléments éta- blissant l’existence d’une fraude à la date de sa décision, elle peut légalement procé- der à son retrait sans condition de délai; que la fraude est caractérisée lorsqu’il res- sort des pièces du dossier que le pétition- naire a eu l’intention de tromper l’adminis- tration sur sa qualité pour présenter la demande d’autorisation d’urbanisme». En l'espèce, le pétitionnaire disposait un engagement du propriétaire à signer une promesse de vente mais qui était caduc. De plus, il savait au moment de la demande de permis qu'une promesse de vente avait été signée par le propriétaire avec une autre société. La cour d'appel en avait déduit que le pétitionnaire avait eu l'intention de tromper l'autorité administrative et avait ainsi obtenu le permis par fraude. Le Conseil d’État valide en conséquence, la décision du maire de retirer le permis. Observations : Si le maire, après la déli- vrance du permis de construire, a connais- sance de nouveaux éléments attestant l'existence d'une fraude à la date de la décision, il peut retirer le permis sans condition de délai. L'intention de tromper l'administration sur la qualité pour présen- ter une demande caractérise une fraude. Pour un arrêt plus ancien rappelant ces mêmes règles, mais admettant le recours du pétitionnaire et rejetant l'argument du maire selon lequel il y avait une fraude, voir CE, 23mars 2015 (n°348261). ■ Association. Intérêt à agir contre un permis de construire (CE, 1 e et 6 e chambres, 20octobre 2017, n°400585, Association Epi d'Or Saint-Cyr- l'école) Une association de riverains avait demandé l'annulation d'un arrêté du maire de Saint- Cyr-l'école accordant un permis de construi- re trois maisons sur un terrain jusque-là non bâti. Le tribunal administratif avait jugé leur requête irrecevable mais l'association avait exercé un recours devant le Conseil d’État. Le Conseil d’État annule le jugement. Le tri- bunal avait considéré que l'objet de l'asso- ciation : « mise en œuvre de tous les moyens disponibles pour la sauvegarde et l’amélio- ration du cadre de vie des habitants de l’Epi d’or » était « trop général et éloigné des considérations d’urbanisme » pour lui conférer un intérêt lui donnant qualité pour agir contre le permis » litigieux. Le Conseil d’État juge au contraire que « le p rojet autorisé, par sa nature, le nombre de constructions autorisées, le choix d’implan- tation retenu et la densification qu’il indui- sait, était susceptible de porter atteinte au cadre de vie des habitants du quartier de l’Epi d’or, dont l’association requérante avait pour objet d’assurer la sauvegarde ». Observations : Une association de défense de l'environnement d'un quartier est ainsi recevable à agir contre un permis de construire trois maisons, sur un terrain jusque-là non bâti, car il est susceptible de porter atteinte à leur cadre de vie. Le Conseil d’État fait donc une appréciation large de l'intérêt à agir contre un permis de construire. ■ Intérêt à agir contre un permis de construire un immeuble de 29 logements sociaux (CE, 6e et 1e chambres, 16octobre 2017, n°396494, OPH d'Avignon) La commune d'Avignon avait accordé un permis de construire à l'OPH d'Avignon pour un ensemble de 29 logements. Le per- mis était attaqué par une association « Bien vivre dans le quartier de l’intra-muros d’Avi- gnon » et le syndicat de copropriétaires d'un immeuble voisin. Le recours avait été jugé irrecevable mais l'OPH voulait obtenir condamnation des requérants à lui verser la somme de 802000euros au titre d'un recours abusif, au sens de l'article L 600-7 du code de l'ur- banisme. La cour d'appel avait jugé que le syndicat des copropriétaires avait un intérêt à agir contre le permis de construire, car il était directement voisin du projet mais il avait jugé le recours irrecevable car le syndic avait omis de produire la délibération de l'assem- blée générale l'autorisant à engager une action en justice (en conformité avec l'ar- ticle 55 du décret du 17mars 1967). La cour avait jugé que cela ne suffisait pas à consi- dérer que le recours avait été mis « en œuvre dans des conditions excédant la défense de ses intérêts légitimes». Le Conseil d’État valide ce raisonnement. En revanche, la cour ayant omis de statuer sur les conclusions de l'OPH en ce qu'elles étaient également dirigées contre l'associa- tion, l'arrêt est sur ce point annulé. Observations : Le Conseil d’État approuve la cour d'appel d'avoir jugé que le fait de ne pas avoir produit le PV d'assemblée de la copropriété habilitant le syndic à agir en justice contre le permis de construire liti- g ieux, ne constituait pas un motif pour condamner le syndicat pour recours abusif. Il s'agissait manifestement d'une erreur du syndic puisque cette omission a empêché le recours de prospérer. Le bénéficiaire du permis de construire a donc bénéficié de cette erreur, même s'il reste à trancher le rejet du recours à l'égard de l'association. ■ Annulation partielle du permis (CE, 2 e et 7 e chambres, 16octobre 2017, n°398902) Une cour d'appel avait fait application de l'article L 600-5 du code de l'urbanisme qui permet au juge de prononcer l'annulation partielle d'un permis de construire. Il s'agis- sait d’un permis de construire un immeuble qui avait été suivi d'un permis rectificatif. L'annulation était prononcée en tant que ces permis portaient sur les locaux commer- ciaux et le rez-de-chaussée donnant sur l’es- pace public du bâtiment projeté. Or le Conseil d’État annule la décision, en relevant qu'il « appartient [au juge] de constater préalablement qu’aucun des autres moyens présentés devant lui suscep- tibles de fonder une annulation totale de cette autorisation ne peut être accueilli et d’indiquer dans sa décision pour quels motifs ces moyens doivent être écartés. […] Considérant que la cour n’a pas indiqué les raisons pour lesquelles elle estimait que les autres moyens invoqués par les requérants, dont elle était saisie par l’effet dévolutif de l’appel, et qui étaient susceptibles d’entraî- ner une annulation totale des permis contestés, n’étaient pas fondés; qu’en sta- tuant ainsi, alors qu’il lui appartenait, avant de prononcer en application des disposi- tions de l’article L. 600-5 du code de l’urba- nisme, l’annulation partielle du permis de construire, de constater qu'aucun des autres moyens invoqués devant elle n'était fondé ». L'annulation partielle est donc annulée. Observations : L'article L600-5 du code de l'urbanisme permet au pétitionnaire d'évi- ter une annulation totale de son permis et l'autorise à régulariser le vice dans le délai fixé par le juge. L'annulation partielle a ainsi été admise pour un permis portant sur trois éoliennes dont seule une était illé- gale (CAA Nancy, 2juillet 2009) ou deux chalets dans une résidence (CAA Lyon 16octobre 2012) ou encore un balcon 7 novembre2017 7 U RBANISME JURISPRUDENCE
implanté sur une façade d'un immeuble collectif social (CAA Marseille 7octobre 2010). Mais l'annulation partielle est par- fois impossible, par exemple si le motif d 'annulation est une violation de la loi lit- toral (CAA Bordeaux, 4mars 2010). Mais le texte comporte par ailleurs une exi- gence de procédure: le juge doit constater que les autres moyens ne sont pas fondés. Faute d'avoir examiné tous les autres moyens, l'arrêt d'appel est ici censuré. ■ Exigence de produire le justifica- tif d'une servitude de cour com- mune (CE, 2 e et 7 e chambres, 16octobre 2017, SCCV avenue de Gambetta à Bagnolet, n°401706) Une société avait obtenu un permis de construire un immeuble de 101 logements à Bagnolet. Il était prévu une servitude de cours communes grâce à la cession d'une fraction de parcelle appartenant à la com- mune et sur laquelle se trouvait un groupe scolaire. Mais la cour d'appel avait annulé ce permis au motif que: « il incombait à la société, pour l’application des dispositions de l’article R. 431-32 du code de l’urbanisme, de joindre à sa deman- de des documents de nature à établir que la servitude aurait pris effet à la date de déli- vrance du permis ». Le Conseil d’État censure la décision. Il pré- cise l'interprétation qu'il convient de don- ner à l'article R431-32 selon lequel la demande de permis doit être « accompa- gnée des contrats ou décision judiciaires relatifs à l'institution de ces servitudes ». L'arrêt indique « que ces dispositions n’im- posent pas que la servitude ait été établie et soit entrée en vigueur avant que le per- mis de construire ne soit délivré ». En l'espèce, le pétitionnaire avait produit la copie d'un projet de convention d'institu- tion de la servitude, la promesse de vente du terrain par la commune mentionnant qu'elle s'engageait à constituer la conven- tion de cour commune et précisant ses contours. Ces éléments sont donc jugés suf- fisants. Observations : Voici cette fois un arrêt de nature à satisfaire le pétitionnaire. L'article R 431-32 lui impose de produire les contrats ou décisions judiciaires « relatifs à l'institution » des servitudes de cours com- munes sur les terrains voisins. La lettre du texte n'exige pas que la servitude soit déjà instituée. Le Conseil d’État en fait donc une interprétation souple en admettant du pétitionnaire qu'il produise des élé- ments attestant de son institution future. Il s'agissait en l'espèce d'une promesse de v ente assortie d'un engagement du ven- deur de constituer la servitude. Certificat d'urbanisme ■ Sursis à statuer sur une deman- de ultérieure de PC sur le fonde- ment du futur PLU (CE, 6 e et 1 e chambres, 11octobre 2017, n°401878) Un pétitionnaire avait obtenu un certificat d'urbanisme en septembre2011 puis dépo- sé une demande de permis de construire en décembre2011. Or, le 17février 2012, le maire avait opposé un sursis à statuer au motif que le projet de construction serait de nature à compromettre ou rendre plus oné- reux l'exécution du plan local d'urbanisme alors en cours d'élaboration et approuvé le 27février 2012 par le conseil municipal. En mai2012, le maire avait refusé le permis car contraire au PLU venant d'être approuvé. Le Conseil d’État se réfère à l'article L 123-6 du code de l'urbanisme pour apprécier le bien-fondé de la décision du maire. Cet article lui permet, à compter de la publica- tion de la délibération prescrivant l'élabora- tion d'un PLU d'opposer un sursis à statuer sur une demande de permis qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan. Mais l'article L 410-1 permet au pétitionnaire d'être garanti d'une stabilité des règles d'urbanisme pendant 18 mois après l'ob- tention du certificat d'urbanisme. Le Conseil d’État indique que le certificat d'urbanisme doit mentionner l'éventualité d'une demande de sursis à statuer, et que l'absence de cette mention pourrait enta- cher d'illégalité le certificat d'urbanisme mais ne fait pas obstacle à la faculté pour le maire d'opposer le sursis à statuer et ajou- te: « lorsqu'un certificat d'urbanisme a été déli- vré sur le fondement du a) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme et que, dans les conditions prévues aux articles L. 111-7 et L. 111-8 du même code, un sursis à sta- tuer est opposé à la demande de permis de construire présentée par le bénéficiaire de ce certificat au motif que cette demande serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du plan local d'urbanisme dont l'élaboration est en cours, l'autorité compétente pour statuer sur la demande est fondée à faire applica- tion du nouveau plan local d'urbanisme si, à l'expiration du délai de sursis à statuer, ce nouveau plan est entré en vigueur ». Observations : L'article L410-1 a du code de l'urbanisme permet au pétitionnaire d'obtenir dans le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée « les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanis- me applicables à un terrain » . Le même article ajoute que si la demande d'autori- sation est présentée dans un délai de 18 mois à compter de la délivrance du CU, les règles mentionnées ne peuvent être remises en cause. L'article écarte toutefois les règles de sécurité et de salubrité publique. Mais cette garantie a ses limites: elle ne s'étend pas au cas où l'élaboration d'un nouveau PLU est en cours d'élaboration. En effet, le maire peut alors opposer un sursis à statuer en se fondant sur l'article L 111-7 si la demande est de nature à com- promettre ou rendre plus onéreuse l'exé- cution du PLU en cours d'élaboration et si, à l'expiration du délai de sursis à statuer, le nouveau PLU est entré en vigueur. Cet arrêt en fournit un exemple. Urbanisme commercial ■ Rôle des CDAC: vérifier la com- patibilité du projet avec les objec- tifs du SCOT (CE, 4 e et 5 e chambres, 11octobre 2017, n°401807, Fédération des artisans et com- merçants de Caen "Les vitrines de Caen") Plusieurs associations contestaient l'autori- sation accordée par la commission nationa- le d'aménagement commercial à Inter Ikea de construire un ensemble commercial à Fleury-sur-Orne. Le Conseil d’État se fonde sur l'article L 122- 1 du code de l'urbanisme (dans sa version issue de la loi du 4 août 2008) et indique qu'en matière d'urbanisme commercial, il n'appartient pas aux SCOT d'interdire par des dispositions impératives, certaines opé- rations de création ou d'extension, mais qu'ils « peuvent fixer des orientations géné- rales et des objectifs d’implantations préfé- rentielles des activités commerciales définis en considération des exigences d’aménage- ment du territoire, de protection de l’envi- ronnement ou de qualité de l’urbanisme ». 7 novembre2017 8 U RBANISMECOMMERCIAL JURISPRUDENCE
En conséquence, « il appartient aux com- missions d’aménagement commercial non de vérifier la conformité des projets d’ex- ploitation commerciale qui leur sont soumis a ux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais d’apprécier la compatibili- té de ces projets avec les orientations géné- rales et les objectifs qu’ils définissent ». Le Conseil d’État annule l'arrêt d'appel en ce qu'il avait jugé qu'invoquer les orienta- tions du SCOT avait un caractère inopérant car elles étaient relatives aux documents d'urbanisme. L'arrêt juge au contraire que: « il appartenait [au juge] d’apprécier la compatibilité du projet avec les orientations générales du schéma de cohérence territo- riale prises dans leur ensemble, y compris celles se présentant formellement comme régissant des actes distincts des autorisa- tions d’exploitation commerciale ». L'arrêt de la CAA de Caen est donc annulé et l'affaire renvoyée à la cour de Nantes. Observations : Il appartient donc aux CDAC de vérifier non la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations du SCOT mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent dans leur ensemble, y compris celles qui régissent formellement des actes distincts des autori- sations d'exploitation commerciale. Précisons par ailleurs, que si l'article L 122-1 a été abrogé, les SCOT en cours d'élabora- tion ou de révision approuvés avant le 1 er juillet 2013, dont le projet de schéma a été arrêté par l'EPCI avant le 1 er juillet 2012, peuvent opter pour l'application des dispositions antérieures. L'abrogation de l'article L 122-1 est donc sans incidence sur l'application de cette règle si la commune a opté pour l'application des dispositions antérieures. Plans de prévision des risques naturels prévisibles ■ Opposabilité aux autorisations délivrées aux ICPE (CE, 6 e et 1 e chambres, 9octobre 2017, n°397199, Société Les carrières de Mougins) Le préfet avait refusé le renouvellement d'une autorisation d'exploitation de car- rières en se fondant sur un plan de préven- tion des risques naturels. Le Conseil d’État valide le refus d'autorisation. Il se fonde sur l'article L 562-1 du code de l'environnement qui prévoit le mode d'élaboration des plans de prévention des risques naturels prévi- sibles. Il en déduit « qu'il résulte de ce qui précède que la cour, en jugeant que les prescriptions du plan de prévention des risques d'incendie de forêt qui déterminent les occupations et utilisations du sol admises en zone dite rouge, c'est-à-dire de danger fort, sont opposables à la demande d'auto- risation d'exploitation de la carrière en cau- se, la cour n'a commis aucune erreur de droit ». Observations : Il résulte de cet arrêt que les plans de prévention des risques naturels prévisibles sont opposables aux autorisa- tions relatives aux installations classées pour la protection de l'environnement. Logement social DALO ■ Un délai d'attente de 13 ans pour obtenir un logement social (CE, 5 e et 4 e chambres, 13octobre 2017, n°399710) Une personne avait demandé à la commis- sion de médiation d'être relogée d'urgence. La commission ayant refusé, elle avait saisi, sans succès, le tribunal administratif. Pour être désigné comme prioritaire et d evant être relogé d'urgence, le deman- deur doit être de bonne foi, satisfaire aux conditions réglementaires d'accès au loge- ment social et justifier qu'il se trouve dans une des situations de l'article L 441-2-3 II du CCH et qu'il satisfait à l'un des critères de l'article R 441-14-1. Le Conseil d’État précise que « dans le cas particulier d’une personne se prévalant uniquement du fait qu’elle a pré- senté une demande de logement social et n’a pas reçu de proposition adaptée dans le délai fixé en application de l'article L. 4411- 4 du CCH, la commission peut légalement tenir compte de la circonstance que l’inté- ressé dispose déjà d’un logement, à condi- tion que, eu égard à ses caractéristiques, au montant de son loyer et à sa localisation, il puisse être regardé comme adapté à ses besoins ». En l'espèce, le demandeur avait présenté sa demande 13 ans plus tôt. L'arrêt déduit des textes précités: « en retenant, pour rejeter son recours contre le refus qui lui avait été opposé, que « la circonstance que M. A. disposerait de revenus modestes et aurait accumulé une dette de loyer n’est pas au nombre des cri- tères mentionnés à l’article R. 441-141 du code de la construction et de l’habitation », le tribunal administratif de Marseille a ainsi commis une erreur de droit ». Observations : Pour être désigné prioritaire comme devant se voir attribuer d'urgence un logement social, le demandeur doit: - être de bonne foi, - satisfaire aux conditions d'accès au loge- ment social, - justifier qu'il est dans l'une des situations prévue à l'article L 441-2-3 II du CCH, - et qu'il satisfait à l'un des critères de l'ar- ticle R 441-14-1. Mais dans le cas où une personne se pré- vaut uniquement du fait qu'elle a présenté une demande de logement et qu'elle n'a pas reçu de proposition dans le délai légal, la commission peut tenir compte du fait que cette personne est logée, si le loge- ment (localisation et loyer) est adapté à ses besoins. En l'espèce, le demandeur attendait depuis 13 ans. Pour rejeter sa demande, la com- mission ne pouvait faire valoir qu'il était logé, alors que le loyer dépassait ses capa- cités financières. ● 7 novembre2017 9 L OGEMENTSOCIAL ■ Élections au conseil d’adminis- tration d’un OPH A propos des élections visant à assurer la représentation des locataires au conseil d'administration des offices publics de l’habitat, le Conseil d’État indique que : - Un litige relatif à l'élection d'un candi- dat au motif de son inéligibilité relève des juridictions administratives , sauf en cas de difficulté sérieuse justifiant le ren- voi d'une question préjudicielle à l'autori- té judiciaire, - Si un OPH refuse de diffuser la liste d'une association de locataires au motif que certains candidats étaient débiteurs de charges locatives mais qu’il a informé les locataires que les sommes dues ne seraient exigibles qu'à compter d'une cer- taine date, le fait qu'un locataire ne puis- se produire une quittance attestant de leur versement lors du dépôt des listes ne peut le faire regarder comme inéligible. Il ne s'agit pas d'une difficulté sérieuse jus- tifiant le renvoi devant la juridiction judi- ciaire. (CE 13octobre 2017, 5 e et 4 e chambres, n°397853, OPH Terres du Sud Habitat et AFOC) JURISPRUDENCE
7 novembre2017 10 ■ Renvoi en commission Une proposition de loi, déjà adoptée au Sénat, a été examinée par les députés le 12octobre. Le texte prévoit le maintien des compétences « eau » et « assainissement » dans les compétences optionnelles des com- munautés de communes et des communau- tés d’agglomération. La ministre Jacqueline Gourault (ministre auprès du ministre de l'intérieur) indique que le Gouvernement ne souhaite pas revenir sur l'équilibre né de la réforme territoriale. Cela n'exclut pas des adaptations, comme pour la gestion des milieux aquatiques et prévention des inon- dations, mais ce texte ne l'aborde pas. Ce texte, selon la ministre, a pour objectif prin- cipal d’annuler le transfert prévu par la loi des compétences « eau » et « assainisse- ment » aux intercommunalités. Elle propose que la question soit débattue dans le cadre de la conférence nationale des territoires et demande un renvoi du texte en commission. Le renvoi en commission a été voté. (JO AN débats, 12octobre 2017, 2 e séance) L OISURL ’ EAU ■ Transformer le modèle écono- mique Les députés ont abordé l'examen du projet de loi de finances le 17octobre. "Transfor- mer le modèle économique français": tel est l'objectif de ce texte, explique Bruno Le Maire en introduction au débat. Le taux de croissance est évalué à 1,7% en2017 et2018. Il s'agit de profiter de ce contexte clément pour accélérer la transformation économique. Pour cela, la première exigen- ce est de mettre en place une fiscalité qui encourage l'activité. Pour aider à investir, il faut arrêter de surtaxer le capital afin de financer l'investissement qui fera l'innova- tion de demain et les emplois des Français. L'allégement de la fiscalité passe par la mise en place d'un prélèvement forfaitaire unique à 30% sur tous les revenus du capi- tal, sans changer la fiscalité de l'épargne salariale ni celle de l'épargne populaire (livret A et LDD). Pour l'assurance-vie, seront concernés les futurs versements mais seulement au-delà de 150000euros d'en- cours. L'ISF sera remplacé par un IFI, avec les règles de l'ISF sur le volet immobilier. Ce maintien se justifie, car un euro investi dans l'immobilier "ne crée pas le même effet d’entraînement qu’un euro investi dans une entreprise", et ce secteur bénéfice déjà d'avantages comme l'exonération de plus-values sur la résidence principale, le PTZ ou le dispositif Pinel. L'IS sera réduit avec un taux de 28% dès 2018, pour la fraction de bénéfice inférieure à 500000euros. Gérald Darmanin indique que le Gouver- nement va opérer une réforme majeure de la politique du logement, qui coûte 40mil- liards d'euros, dont 18 pour les APL alors que les mal-logés sont toujours aussi nom- breux. La réforme consiste à recentrer l'aide sur ceux qui en ont le plus besoin, à aider les offices HLM à se regrouper et à soutenir le développement de l'offre de logements. La suppression de la taxe d’habitation per- mettra un gain de 600euros par an et par contribuable. Laurianne Rossi, rapporteure pour avis, annonce un amendement à l'article 8 qui réforme le crédit d'impôt pour la transition énergétique. Éric Woerth déplore que l'ef- fort pour le redressement des finances publiques ne soit pas plus important. Il cri- tique aussi la réforme des plans d'épargne logement, qui doivent être soumis au prélè- vement de 30%, supérieur au prélèvement actuel et appliqué dès le premier euro. ■ Taxe d’habitation S'agissant de la taxe d'habitation, Gilles Carrez prédit que cette réforme sera suivie d'une mesure de retrait de la liberté de fixa- tion des taux par les communes ; il ajoute que la réforme sera censurée par le Conseil constitutionnel au nom d'une rupture d'égalité. Le député explique que créer l'IFI est une erreur car l'immobilier aura une PLF 2018 À L ’ ASSEMBLÉE Le projet de loi de finances à l’Assemblée Le débat budgétaire, commencé le 17octobre, a suscité de vifs débats, notamment sur la création du prélèvement forfaitaire unique (PFU ou flat tax) et sur le rempla- cement de l’ISF par l’impôt sur la fortune immobilière. reproduction interdite sans autorisation triple peine fiscale: taxation du stock avec l'IFI et le foncier bâti dont il prédit l'envolée avec la suppression de la taxe d'habitation, et taxation sur le flux, car ce n'est pas la flat tax (PFU), mais la taxation au barème qui s'appliquera. La motion de rejet préalable a été repous- sée. Même rejet au cours de la 2e séance du 17octobre pour une motion de renvoi en commission. Dans la discussion générale, Charles de Courson évoque la baisse de 1,7 milliard des crédits consacrés au logement. Il approuve le fait de recaler sur l'année n les revenus pris en compte (économie de 500millions), mais condamne la réduction de 1,2milliard au titre de la réduction des APL. Suite des débats le 18octobre. Marc Le Fur critique la concentration du PTZ dans les zones A et B1 au détriment des zones B2 et C, ce qui va exclure le monde rural, les petites villes et les villes moyennes et y cas- ser le mécanisme d'accession à la propriété. Il déplore aussi la fin brutale du dispositif d'aide au changement des portes et fenêtres. ■ Baisse des APL François Pupponi dénonce l'attaque portée aux bailleurs sociaux, estimant que la bais- se des APL, qu'on leur demande de com- penser, va provoquer la baisse de l'entretien des logements et réduire la construction des logements sociaux, qu'il évalue 50000 logements en moins pour 2018. Jean-Baptiste Djebbbari approuve la trans- formation du CITE en prime dès 2019, car elle sera plus rapidement mobilisable pour les travaux. Bénédicte Peyrol plaide pour la fiscalité environnementale et estime que la transfor- mation de l'ISF en IFI est un outil de transi- tion écologique car une part accrue de l'épargne ira ver le financement de long ter- me et créera une croissance durable. Les députés ont examiné ensuite les articles du projet de loi de programmation des finances publiques de2018 à2022, tâche qu’ils ont poursuivie dans la 2e séance du 18octobre. ■ Examen des articles Le 19octobre, les députés ont adopté l'ar - ticle 10 qui double le plafond applicable
aux auto-entrepreneurs. Jean-Luc Mélen- chon critique cette mesure qu'il analyse comme une extension du plafond de cotisa- tion du travailleur à la tâche. Didier Martin en revanche la soutient, en tant que régime permettant le début d'une activité profes- sionnelle et qui permet à certains de ses bénéficiaires de fonder ensuite une véri- table entreprise. Sylvia Pinel a défendu un amendement de suppression de l'article, indiquant que la CAPEB est inquiète de ce projet. L'amendement a été rejeté et l'article, amendé a été voté. ■ ZRR Le débat s'est porté sur le bilan des zones de revitalisation rurale , dont Marc Le Fur notamment demande la modification, tan- dis que Bruno Le Maire s'y oppose, dans l'attente qu'un bilan puisse être fait de la réforme précédente, entrée en vigueur seu- lement au 1erjuillet 2017. L'amendement n°83 a été repoussé. Dans la 2e séance du 19 octobre, David Lorion a présenté un amendement (n°777) pour prolonger jusqu'à 2025 le dispositif de réduction d'impôt en faveur de la construc- tion de logements sociaux outre-mer , mais il n'a pas été suivi. À l'occasion de l'amendement n°981 de François Jolivet (finalement retiré) sur le statut d'Action Logement , Bruno Le Maire a précisé que, pour les exonérations d'IS applicables aux activités d'intérêt général, le Gouvernement vérifie si les critères d'inté- rêt général sont remplis par Action loge- ment groupe et si cela ne constitue pas une aide d’État au sens de l'Union européenne. François Jolivet demande aussi une exoné- ration d'impôt pour les organismes HLM qui cèdent des logements libres, mais il a retiré son amendement (n°985) à la deman- de du ministre. Bruno Le Maire a plaidé pour prolonger l'application du taux réduit d'IS à 19% pour la plus-value réalisée lors de la ces- sion de locaux professionnels pour leur transformation en logement dans un délai de 4 ans (amendement n°1361). Il serait étendu aux cessions de terrains à bâtir si le cessionnaire s'engage à construire des loge- ments dans le délai de 4 ans, mais recentré sur les zones tendues. La mesure s'appli- quera aux cessions jusqu'à fin 2010 et aux promesses conclues avant cette date si la cession intervient au plus tard le 31décembre 2022. Le mécanisme est prévu pour toutes les sociétés soumises à l'IS. L'amendement a été voté. François Pupponi a demandé l'extension de l'exonération pour les sociétés qui vendent à des sociétés construisant pour vendre, mais il n'a pas été suivi (rejet de l'amendement n° 1230). Damien Abad a proposé de rendre éligibles au PTZ les travaux d'aménagement d'une résidence, pour les personnes handicapées, mais son amendement (n°199) a été rejeté. Émilie Cariou a obtenu le vote de l'amende- ment n°588 qui atténue dans le temps les effets de la sortie du dispositif de ZRR, aménageant une période de transition. ■ Création du PFU L'article 11 concerne la création du prélève- ment forfaitaire unique (PFU). Éric Cocque- rel conteste le principe de ce prélèvement, de même que Christine Pires-Beaune. Marc Le Fur déplore qu'il ne s'applique pas à l'immobilier. Gilles Carrez en revanche sou- tient la mesure, rappelant que soumettre les revenus du capital au barème en 2012-2013 fut une très mauvaise mesure, car l'épargne, avant de se constituer, a déjà été imposée. Jean-Luc Mélenchon estime que l'argent n'ira pas vers l'économie réelle. Quant à Charles de Courson, il défend la mesure. Répondant à une question d'Eric Woerth, Bruno Le Maire confirme que la taxation à 30% donnera lieu à abattement de 40% pour les contribuables qui choisissent l'im- position au barème, mais non pour ceux qui seront imposés au PFU. Dans la 3e séance, Nicolas Forissier a pro- posé de soumettre les revenus fonciers au PFU , mais son amendement (n°1264) a été rejeté, le ministre soulignant le coût de la mesure proposée (3,3milliards). Il ajoute plus loin que si la taxation était effectuée au taux de 30%, alors elle le serait sur les reve- nus bruts, sans déduction de charges, ce qui ne serait pas forcément intéressant pour le contribuable. Valérie Rabault a proposé de maintenir le régime actuel applicable à l'épargne loge- ment. Son amendement n°1033 a été rejeté, Bruno Le Maire indiquant que le stock des plans n'est pas touché, seuls les nouveaux plans seront concernés par le nouveau régi- me. Il ajoute que les PEL coûtent 800mil- lions d’euros à l’État alors que les épar- gnants ne s'en servent plus pour emprun- ter, car les taux dépassent ceux du marché. L'article 11, amendé, a été voté. Le 19octobre a été adopté un amendement n°592 d'Émilie Cariou pour soumettre au taux de 12,8% (soit 30% prélèvements sociaux compris) au lieu de 16% les plus- values réalisées par les particuliers à titre professionnel dans le cadre de leur activité d’indépendant, de commerçant ou d’agri- culteur. ■ Création de l’IFI L'article 12 créant l'impôt sur la fortune immobilière a suscité de longs débats. Emmanuelle Menard souligne que le place- ment immobilier sera découragé. Luc Car- vounas critique "le président des riches". Véronique Louwagie regrette que l'immobi- lier reste taxé par l'IFI. François Ruffin accu- se le Gouvernement de mener une poli- tique violente qui prend aux pauvres (via la CSG et les APL) pour donner aux riches (avec la flat tax et la suppression de l'ISF). François Pupponi est choqué que la réfor- me qui fait 5milliards d'euros de cadeaux aux plus riches soit concomitante de la réforme de l'APL qui ponctionne 400mil- lions aux plus pauvres. Richard Ferrand explique que l'ISF, est un impôt peu ren- table et qui inhibe l’injection de capital dans les PME et ETI qui manquent de fonds propres. La mesure, complétée par un plan d'investissements, sera utile pour lutter contre le chômage. Bruno Le Maire indique que les cent pre- miers contributeurs à l'ISF paient 126mil- lions d'euros. Or les cent premiers patri- moines paient 73millions d'euros. L'ISF est donc inefficace et injuste par les plus gros patrimoines ne le paient pas et arrivent à y échapper. Défendant un amendement de suppression de l'article 12 (qui a été repoussé), Sébastien Chenu indique que le Gouvernement envoie un signal: ne soyez plus jamais pro- priétaires, préférez le casino, les placements financiers. En appui à sa position de création de l'IFI, Bruno Le Maire rappelle que les plus- values de cession de résidence principale sont exonérées d'impôt. Il dénonce la cri- tique selon laquelle il y aurait une rupture 7 novembre2017 11 PLF 2018 À L ’ ASSEMBLÉE
d'égalité, car un dispositif fiscal est fait pour différencier les revenus du travail, les revenus du capital et ceux de l'immobilier. Charles de Courson soutient la réforme car elle supprime 80% de l'ISF. Les amende- ments visant à supprimer l'IFI ont été reje- tés. Suite des débats le 20octobre (2e séance), Bruno Le Maire propose (amendement n°1364) de soustraire de l'assiette de l'IFI, les immeubles situés - dans les sociétés ou organismes opéra- tionnels dont le recevable détient, directe- ment ou indirectement, moins de 10% du capital ou des droits de vote et - dans les organismes de placement collec- tif ou fonds généralistes dont l'actif est composé à moins de 20% d'immobilier et dont le redevable détient moins de 10% des parts ou actions. Mais sont exclues dans le calcul de la frac- tion des parts, les dettes contractées par une société auprès des membres du foyer fiscal. Éric Woerth demande si les SIIC sont concernées. Gilles Carrez souligne que cet amendement qui vise les OPCI et les SCPI, montre la difficulté de tracer la frontière entre l'investissement productif ou non. Bruno Le Maire confirme que les SIIC les actionnaires sont dans l'assiette mais qu’il travaille à un dispositif pour exonérer les petits actionnaires des SIIC, par exemple ayant moins de 10 % des parts. Le ministre précise par ailleurs que la taxe foncière sera déductible, mais non la taxe d'habitation. L'amendement a été voté. ■ Monuments classés, immobi- lier d’entreprise Christine Pires-Beaune a proposé (amende- ment n°1039) de soumettre les œuvres d'art à l'IFI, mais elle n'a pas été suivie, et Gilles Carrez souligne à cette occasion l'incohé- rence qu'il y a à soumettre les monuments historiques à l'IFI. Lise Magnier a proposé d'exonérer d'IFI la résidence principale (amendement n°732), mais son amendement a été repoussé. Bri- gitte Kuster demande une exonération pour les monuments historiques ouverts à la visite (amendement n°217), soulignant que 7% des 44000 bâtiments classés sont en situation de péril. Véronique Louwagie observe que sont exclus de l'IFI certains biens immobiliers à vocation économique sous condition de lien entre le propriétaire et l'exploitant mais que sont soumis à l'IFI les biens loués à une entreprise n'ayant aucun lien juridique avec le propriétaire. Or les propriétaires qui par exemple donnent à bail des terres à de jeunes agriculteurs, remplissent un vrai rôle économique qui mériterait d'être pris en compte. L'amendement 217 a été rejeté. Jean-Paul Mattéi a proposé (amendement n°786) d'exonérer d'IFI les locaux commer- ciaux ou d'habitation loués par des investis- seurs par des baux de plus d'un an, mais sans plus de succès. Nouvelle tentative avec Gilles Lurton (amendement n°225) qui cite l'exemple d'un ancien industriel sollicité pour acqué- reur des locaux et les louer à l'entreprise qu'il possédait, mais il répond que s'il achè- te ces locaux il devient passible à l'impôt sur la fortune. Il refuse donc de le faire. Le député propose une exonération pour les bien loués. Le ministre répond que s’agis- sant des biens qui ne servent pas l'activité professionnelle du contribuable, il n'y a pas de raison de les exonérer d'IFI. Jean-Paul Mattéi explique qu'il veut exoné- rer les biens loués à un dirigeant ou au moins à une entreprise dirigée par son pro- priétaire. Véronique Louwagie expose le cas d'un artisan voulant partir à la retraite. Le repreneur veut bien reprendre le fonds de commerce, mais non l'immobilier. Or l'artisan vendeur, va donc être soumis à l'IFI, il n'a donc pas intérêt à le conserver. Les exploitants vont donc avoir du mal à trouver des personnes acceptant de finan- cer l'immobilier. Amélie de Monchalin répond que de nom- breux propriétaires ne sont pas soumis à l'ISF et que dans les cas évoqués plus haut, ces biens sont déjà soumis à l'ISF. Bruno Le Maire confirme que les questions évoquées sont exactement les mêmes qu'avec l'actuel ISF et l'amendement a été rejeté. Damien Abad ironise sur l'IFI, "impôt sur la fin de l'immobilier" et demande l'exonéra- tion d'IFI pour la résidence principale, mais son amendement (n°177) a été repoussé. A l'occasion d'un amendement de repli, visant à augmenter l'abattement de 30% sur la valeur de la résidence principale (également rejeté), le ministre a précisé que la constitutionnalité de la création de l'IFI était confirmée par l'avis du Conseil d'Etat. Éric Alauzet a proposé (amendement n°935) d'exonérer d'IFI les titres de sociétés immobilières solidaires, mais le ministre l'a convaincu de retirer son amendement par crainte qu'il soit inconstitutionnel pour cau- se de rupture d'égalité. Le débat s'est ensuite porté sur le dispositif d'ISF-PME. Bruno Le Maire explique les raisons de sa suppression: l'impact du dis- positif est incertain, comme l'a démontré la Cour des comptes dans son rapport de 2015. Bruno Le Maire explique à cette occa- sion les grands objectifs de la politique sui- vie: réaliser l'union des marchés de capi- taux à l'échelle européenne, aller vers une convergence fiscale. Un amendement n°949 a été adopté, pour préciser que les certificats de gestion durable des forêts, permettant de bénéficier d'une exonération d'ISF, seront maintenus en vigueur pour l'IFI. Amélie de Montchalin a obtenu le vote de l'amendement n°1151 qui prévoit la créa- tion d'une mission d'évaluation sur le nou- vel impôt. Jean-Luc Mélenchon estime en conclusion que le Gouvernement défend une vision dépassée du capitalisme, Véronique Lou- wagie déplore qu'aucun amendement des Républicains n'ait été accepté sur cet article et relève que l'impôt est désormais totale- ment déséquilibré puisque les portefeuilles de valeurs mobilières en sont exonérés. Le Modem, les Constructifs soutiennent le vote de l'article. Amélie de Montchalin pour la République en marche indique que cette réforme est un "pacte pour l’investis- sement" et l'article a été voté. A suivre. ● 7 novembre2017 12 PLF 2018 À L ’ ASSEMBLÉE JURIShebdo 168, avenue Marguerite Renaudin 92140 Clamart Téléphone: 0146457769 contact@jurishebdo.fr ■ site internet: jurishebdo.fr ■ Directeur de la rédaction: Bertrand Desjuzeur ■ Mél: bertrand.desjuzeur@jurishebdo.fr ■ JURIShebdo est une publication de la Société de Presse du Breil (SPB), SARL de presse au capital de 10000euros constituée en août2002 pour 99 ans. 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– 2 – Interview –
Sidonie Fraiche-Dupeyrat (LPA-CGR) et Florence Semelin (JLL). Politique du logement: quel impact pour les investisseurs?
– 5 – Jurisprudence –
VEFA : Délai de prescription pour le paiement du solde du prix
Fiscalité : CFE : exonération, dans une ZUS, pour un transfert d’activité
Taxe sur les bureaux en Ile-de-France : exonération pour locaux d’enseignement / Taxe sur les terrains nus rendus constructibles : calcul en cas de division d’un terrain
Urbanisme :
Aménagement : Schéma d’aménagement de plage. Pas de recours contre la délibération du conseil municipal arrêtant le projet
Permis de construire : Fraude dans la fourniture de l’attestation sur la qualité du demandeur. Faculté de retrait / Association : intérêt à agir contre un permis de construire / Annulation partielle du permis / Exigence de produire le justificatif d’une servitude de cour commune
Certificat d’urbanisme : Sursis à statuer sur une demande ultérieure de PC sur le fondement du futur PLU
Urbanisme commercial : Rôle des CDAC
PPR naturels / DALO : un délai d’attente de 13 ans
– 10 – A l’Assemblée –
Le projet de loi de finances à l’Assemblée